La question de la fraude fiscale sous l’angle psychologique actuelle
Directrice adjoint des impôts de Côte d’Ivoire, Bamba Maférima M’Bahia vient de soutenir avec brio une thèse unique intitulée : « traits de personnalité et comportements de fraude fiscale : une approche expérimentale”. La thèse soutenue à l’UFR des Sciences Economiques et Développement d’Abidjan pose une problématique mondiale. Ainsi, aux USA, le Sénat estime à 100 milliards de dollars par an le manque à gagner imputable à l’évasion et à la fraude fiscale. Dans un grand nombre de pays d’Europe et d’Afrique, les recettes perdues se chiffrent en milliards d’euros.
En Côte d’ivoire, selon les informations de la DGI, l’on estime le montant de la fraude fiscale entre 100 et 150 milliards de FCFA chaque année, détaille Bamba Maférima M’Bahia, qui passe en revue les moyens utilisés par différents pays pour y remédier. « L’originalité de notre recherche tient à la prise en compte des facteurs psychologiques comme le sentiment d’équité, d’intégrité et d’éthique, en plus des variables traditionnellement utilisés et surtout au recours de la méthode des scénarios pour expliquer les comportements de fraude fiscale. La littérature économique montre que les variables tels que la sensibilité à l’équité et à l’égalité ont des corrélations avec les comportements fiscaux.
Les travaux de FALKINGER (1988), SPICER et BECKER (1980) mettent en exergue l’importance du sentiment d’équité ou d’iniquité sur les agissements des individus, rappelle Bamba Maférima M’Bahia, qui émet quand même des préalables dans l’approche psychologique. “Nos résultats montrent que le sentiment d’équité contribue à limiter les comportements de fraude seulement dans un contexte de forte probabilité de dénonciation. Nos résultats remettent en cause la plupart de ces travaux”. Et madame M’Bahia d’appeler dans ses conclusions la Direction Générale des Impôts (DGI) à changer de paradigme en allant vers un système de profilage des contribuables et d’analyse approfondie prospective et multidimensionnelle par rapport aux solutions basées uniquement sur des relents de techniques de contrôle. Cette recherche va permettre à l’Administration fiscale de mettre en place une cartographie des risques liés aux traits de personnalité des contribuables pour mieux les catégoriser et les gérer en vue d’élargir l’assiette fiscale en réduisant les coûts des contrôles fiscaux. Bamba Maférima M’Bahia invite également l’administration fiscale à instaurer un pacte de confiance entre elle et les contribuables ce qui pourrait stimuler l’intégrité du contribuable et son consentement à payer librement ses impôts. En fait, cette approche psychologique constitue certainement une voie nouvelle dans une Afrique où l’assiette fiscale est des plus faibles.
A noter que Bamba Maférima M’Bahia a obtenu la mention très honorable avec les félicitations du jury, lors de la soutenance, jeudi 28 janvier 2021, à l’Université Alassane Ouattara de Bouaké au sein de l’Ecole doctorale d’économie et de gestion de l’UFR des Sciences économiques et de développement.