Par Samir Bouzidi, Ethnomarketer & expert international en mobilisation des diasporas africaines. Entrepreneur engagé, CEO de la startup solidaire « Impact Diaspora ».
La pandémie actuelle aura servi à entériner cette réalité inapparente mais pourtant avérée des diasporas en tant qu’acteurs clés de la fameuse résilience africaine. En effet, malgré les alertes et avis de tempête des experts de la Banque Mondiale et autres analystes, les transferts financiers des diasporas africaines, loin d’avoir faibli du fait de la pandémie, ont résisté voire augmenté dans certains pays. Les premiers communiqués des Banques Centrales du Maroc, Mali, Sénégal, Tunisie… commençant à égrener leurs chiffres officiels pour 2020, saluant à l’unanimité, cette diaspora en partenaire fiable qui « n’oublie pas d’où elle vient » !
Doucement mais surement, les diasporas africaines après s’être installées comme les principaux soutiens de leur famille…sont en passe de s’imposer comme les piliers des économies de leur pays d’origine voire un antidote anticrise. Et à l’orée de la nouvelle année qui s’annonce encore plus redoutable que l’année écoulée, les gouvernants africains seraient bien inspirés de se placer enfin dans une configuration de co-construction loyale et sincère avec leur diaspora…
Les Etats africains doivent déconfiner leur vision de la diaspora
Car à y regarder de plus près, ces transferts « impassibles » envoient un message implicite et fort : « Par devoir, nous aidons nos familles…mais rien d’autres pour l’instant» ! ». Et comme on l’observe déjà en Afrique du Nord (Maroc, Tunisie, Algérie…) où les courbes de transfert d’argent de la diaspora, plafonnent structurellement, ces aides aux familles ne sont pas éternelles…Sous l’effet notamment du vieillissement de la diaspora, on sait qu’un « 2 eme ou 3eme G » n’enverra pas autant d’argent à son grand-père qu’un enfant à un parent direct…
L’heure est donc venue de changer de paradigme pour libérer tous les potentiels. La première clé est entre les mains de la classe politique des pays d’origine, qui doit adopter et décliner en actes une position forte et constante vis-à-vis de sa diaspora : « Vous êtes des partenaires stratégiques du développement national, qu’il soit humain ou économique. ».
Aux antipodes des effets d’annonce et autres mesures tacticiennes, il s’agit de placer la cause de la diaspora au-delà des intérêts partisans et autres clivages (ethniques, régionaux…), comme peut l’être la course au vaccin. Les enjeux le commandent : relance économique, paix sociale, souveraineté, inclusions, développement inclusif…Et qui mieux pour ce rôle que la diaspora qui surpasse désormais les IDE ou les aides publiques au développement ?
Les 7 « fruits » de la diaspora
Dans cette perspective, les gouvernants africains doivent penser des dispositifs publics fertilisants, faisant ainsi émerger un écosystème propice aux apports multidimensionnels de la diaspora. Et que l’on ne parle plus ici des transferts traditionnels visant à soutenir le pouvoir d’achat des familles mais de … :
- Epargne (financement structurel de l’économie, soutient de la monnaie nationale, équilibres budgétaires…)
- Investissements productifs avec création d’emplois, achats immobiliers…
- Soutien à la diversification de l’offre touristique et développement des recettes touristiques
- Promotion de l’export
- Transferts de compétences (recherche médicale, innovation, expertises clés pour les entreprises et institutions publiques…)
- Soft power à l’international (capital image du pays, diplomatie économique…)
- Philanthropie (dons aux écoles, soutien à la société civile…)
En substance, passer d’une rente sociale non viagère à un écosystème vertueux ouvrant des horizons nouveaux avec la diaspora qui finit par intégrer le pays d’origine comme une opportunité, un partenaire fiable… ! « Cœurs voisins vaut mieux que case voisine… »
Samir Bouzidi est Ethnomarketer & expert international en mobilisation des diasporas africaines. Entrepreneur engagé – fondateur de la startup solidaire “Impact Diaspora”.