« Le groupe Nestlé valorise les matières premières et les start-up africaines »
Propos recueillis par Albert SAVANA
Avec un chiffre d’affaires annuel de 90 milliards de fr suisses, la multinationale Nestlé fait aujourd’hui de l’Afrique une de ses priorités notamment en termes d’accompagnement des start-up du continent mais aussi des producteurs qui apportent la matière première nécessaire à la création de valeur ajoutée.
Dans l’entretien exclusif accordé à Financial Afrik, Joëlle Abega Oyouomi, Directrice du Centre africain de recherche-développement de Nestlé basé à Abidjan revient de long en large sur les nouvelles opportunités apportées aux jeunes entrepreneurs africains.
Nestlé a noué un partenariat avec les start-up africaines, pouvez –vous expliquer cette nouvelle approche de la multinationale ?
Nous sommes à Dakar pour lancer le R&D Innovation Challenge car depuis trois semaines nous sommes en train de sillonner l’Afrique dans le cadre du concept Panafrican Tour entre le Nigeria, le Ghana, l’Afrique du sud, le Kenya, la Côte-d’Ivoire et la finale à Dakar. On s’intéresse aux start-up pour plusieurs raisons.
D’abord on a de plus en plus de jeunes qui ont de grandes idées mais de réelles difficultés d’accès au marché et à de plus gros volumes.
De notre côté, nous avons le marché de même que le potentiel pour de gros volumes et un outil scientifique qui peut être assez intéressant. Alors nous souhaitons mettre les deux parties ensemble pour d’un côté promouvoir l’entrepreneuriat, supporter les jeunes qui veulent bien se lancer mais de l’autre côté aussi se donner des opportunités d’innover au-delà de ce que Nestlé fait aujourd’hui. Cela devient de ce fait un partenariat gagnant-gagnant.
Quelles sont les thématiques d’actualité abordées par ce challenge panafricain des start-up ?
Nous avons quatre sujets mis dans cette innovation challenge et pour lesquels nous attendons des solutions de la part des start-up et des étudiants pour les universités déjà visitées. Il y’a deux sujets qui sont autour du plastique, c’est une problématique très sérieuse et il faut que tout le monde s’y penche. Une autre thématique concerne les emballages et dont nous attendons es solutions soient biodégradables soient recyclables pour aborder cette problématique de la réutilisation des emballages. Le deuxième sujet a trait aux emballages pour les plantes car nous travaillons beaucoup avec les milieux agricoles et il ya beaucoup de plastique utilisé pour le transport des plantes et là nous recherchons des solutions alternatives au plastique. Le troisième sujet tourne autour de l’innovation pour les femmes allaitantes et les femmes enceintes. C’est très sérieux parce que dans leur état ces jeunes dames ont des besoins nutritionnels accrus. Donc nous cherchons des solutions pour les accompagner durant la grossesse et durant l’allaitement. Le dernier challenge concerne un système de distribution plus poussé. Quelquefois en milieu rural ou en banlieue il y’a des zones éloignées pour lesquelles nous n’avons pas accès à des produits et nous cherchons des solutions qui permettent d’apporter ces produits de qualité au plu grand nombre même dans des zones éloignées qui peuvent souffrir du manque d’infrastructures mais qui ont besoin de ces produits-là.
L’initiative est louable mais qu’est-ce que Nestlé apporte réellement aux start-up africaines ?
Ce qu’on apporte vraiment aux start-up c’est le marché. Vous avez vu les volumes dont on a parlé et Nestlé apporte d’énormes opportunités de pouvoir d’abord piloter dans une échelle raisonnable. Si les premiers résultats sont probants on les met en relation avec des marchés ou on parle de dizaines de milliers de tonnes. Pour nous l’intérêt c’est d’avoir des solutions facilement implémentables dans nos usines.
Nestlé dispose d’un centre africain de recherche développement basé à Abidjan. Quelle est la plus-value qu’apporte cette infrastructure ?
Ce centre pour la recherche et le développement en Afrique sub-saharienne fonctionne sur la base de deux piliers à savoir la matière première agricole car l’agro-alimentaire commence par les matières premières agricoles.
Au niveau de la qualité aussi et des bonnes pratiques agricoles pour faire en sorte que la personne qui produit en milieu rural ait les meilleurs rendements en terme de qualité et que cela reste gagnant-gagnant. Le deuxième pilier c’est le développement de produits à forte valeur ajoutée nutritionnelle. On utilise toute la connaissance des 5000 chercheurs Nestlé disséminés à travers le monde qu’on ramène en Afrique pour développer des produits innovants. Dans l’autre sens on arrive à partager avec ces chercheurs des connaissances pointues sur les matières premières africaines qui pourraient également enrichir et améliorer les performances dans nos pays. Nous travaillons toujours dans l’optique de valoriser les matières premières africaines et la notion de qualité et de sécurité alimentaire restent très importantes. C’est pourquoi nous encadrons certains producteurs. Dans le passé on a travaillé par exemple avec le mil du Sénégal qu’on a valorisé.
Le groupe Nestlé c’est un chiffre d’affaires annuel de 90 milliards de fr suisses. En termes de valeur partagée que représente l’Afrique dans cette manne financière ?
En termes de valeur partagée il ne s’agit pas d’une équation logique entre les ventes globales et ce qu’on fait pour l’Afrique.
Ce qu’il faudrait regarder c’est la contribution qu’on apporte dans l’environnement dans lequel nous opérons. Dans la plupart de nos usines et de nos unités de recherche vous verrez beaucoup d’activités. Pour le cacao par exemple, on parle de l’accompagnement autour de l’éducation, on évoque aussi la problématique du travail des enfants. Dans d’autres endroits vous allez voir des systèmes de distribution d’eau potable pour les populations. Le principe c’est qu’à mesure que Nestlé croît dans son environnement de s’assurer que la communauté autour de cet endroit-là puisse croître.
Cette activité d’Innovation Challenge est une première africaine pour Nestlé. A la prochaine étape nous allons sélectionner un finaliste avec lequel on va travailler pendant quatre mois parce qu’il a une solution mais qui n’a peut-être jamais été testée à l’échelle à laquelle Nestlé pense. Nous allons accompagner la start-up gagnante qui va toutefois garder ses droits en termes de propriété intellectuelle. A la fin on pourrait nouer avec elle une relation de prestation de services.