12 millions d’onces d’or découvertes ces 10 dernières années au Sénégal
Dans l’entretien exclusif accordé à Financial Afrik, le nouveau Directeur général de Teranga Gold Operation(Tgo), Aziz Sy, révèle notamment la découverte au Sénégal de 12 millions d’onces d’or ces dix dernières années. Plusieurs autres thématiques comme la forte pression exercée sur le secteur ou la hausse programmée des prix de l’or à l’international ont été aussi abordées.
Monsieur le Directeur Général, Teranga Gold Operations (Tgo) est la seule multinationale à exploiter actuellement de l’or au Sénégal. Quelle explication pouvez-vous apporter à une telle situation ?
L’industrie minière est une industrie à forte intensité de capital avec un taux de risque élevé dans les phases d’exploration et d’études de faisabilité avant la phase de construction de la mine. Ce processus prend beaucoup de temps. Plus de 12 millions d’onces d’or ont été découvertes au Sénégal au cours des 10 dernières années et il y a quatre nouvelles mines d’or potentielles qui sont à considérer. La baisse du prix de l’or peut influer sur le délai de réalisation de certains de ces projets jusqu’à une nouvelle amélioration des cours mondiaux des matières premières. Cependant, à long terme nous nous attendons à la mise en exploitation de nouvelles mines d’or au Sénégal.
Le Sénégal se positionne comme une plaque tournante de la production aurifère, comment le pays se comporte t-il par rapport à d’autres pays producteurs de la zone comme le Mali ou le Burkina ?
La plupart des pays d’Afrique de l’Ouest ont des codes miniers similaires développés dans le cadre communautaire UEMOA et ils sont tous considérés comme propices à l’investissement minier par les entreprises minières internationales. Un environnement favorable à l’investissement minier renvoie au fait que le pays dispose d’un code minier moderne, l’état de droit et encourage l’investissement étranger. En ce sens, le Sénégal est comparable au Mali et au Burkina en plus de bénéficier d’une position géographique plus favorable. Avec un port de première classe, un excellent accès par voie aérienne et de bonnes infrastructures dans la région productrice d’or combinée à une excellente main-d’œuvre font du Sénégal la destination préférée de Teranga pour ses investissements.
Au delà du Sénégal, est-ce que votre groupe est intéressé par l’exploitation aurifère dans d’autres pays ouest-africains ?
Notre vision est d’être un producteur d’or majeur au Sénégal en tirant le meilleur parti de nos infrastructures et de notre personnel déjà existants. Notre vision officielle déclarée est « Uniquement l’or et Exclusivement au Sénégal ».
Selon l’imaginaire populaire, l’exploitation de l’or profite essentiellement aux multinationales. Comment est ce que Tgo s’organise pour ne pas léser l’Etat du Sénégal et les populations polarisées ?
Notre mission est de partager les bénéfices d’une exploitation minière responsable avec toutes les parties prenantes. D’après notre expérience au Canada, nous croyons que l’exploitation minière peut apporter une contribution significative à l’emploi à la fois en termes d’emplois directs à la mine, ainsi qu’en termes d’emploi indirect en aidant à créer un secteur de l’approvisionnement minier dynamique. Au Canada, comme d’autres juridictions minières à travers le monde, les salaires dans le secteur minier sont les plus élevés de tous les secteurs de l’industrie, de même que les sociétés minières paient des impôts importants qui profitent aux pays d’accueil. Au-delà de l’emploi et des impôts, nous investissons dans notre personnel et dans la communauté, grâce à des investissements dans l’éducation, les soins de santé, l’approvisionnement en eau potable, l’agriculture et les activités économiques durables. Notre objectif est de veiller à ce que les populations locales soient mieux loties après la fermeture de la mine.
Dans quelle mesure l’exploitation minière en général et de l’or en particulier peut-elle être cruciale pour la réussite du Plan Sénégal émergent (Pse) ?
Les mines sont souvent situées dans des zones frontalières, enclavées et les plus reculées du pays offrant des emplois et une activité économique à des régions avec très peu d’alternatives. Sabodala est situé à 650 km de Dakar, à environ 30km de la frontière avec le Mali. Nous employons environ 1200 personnes dont plus de 90% de sénégalais et dont plus de la moitié provient des communautés locales autour de la mine. Les emplois dans les mines d’aujourd’hui sont plus techniques nécessitant plus de qualification. Depuis que Sabodala a été construit, un certain nombre de sociétés d’approvisionnement minier ont vu le jour, procurant des emplois à beaucoup plus de personnes que ceux travaillant directement à la mine. Sabodala et l’industrie minière en général paient des impôts importants qui aident à financer les projets nationaux dont les retombées bénéficient à tous les Sénégalais. En bref, l’industrie minière offre des emplois bien rémunérés, est souvent le plus grand employeur dans les régions éloignées et paie des impôts importants qui aident à financer le développement national. Le secteur minier fait partie des 6 secteurs prioritaires du PSE et contribuera directement à la réalisation des axes 1 et 2 du PSE. L’axe numéro 1 du PSE consiste à une transformation structurelle de l’économie sénégalaise à travers la consolidation des moteurs de croissance existants et le développement de nouveaux moteurs et l’axe numéro 2 consiste à améliorer de façon significative le bien être des communautés locales et stimuler le développement de régions viables. Le Plan d’Action Prioritaire 2014-2018 du PSE est conçu pour atteindre un taux de croissance annuel moyen de 7,1% et parmi les 27 projets phare du PSE, 6 sont des projets miniers et le projet phare PP14 porte sur l’accélération de l’exploitation du secteur aurifère du Sénégal et vise un objectif de production annuelle de 17 tonnes d’or par an d’ici à 2020 soit quasiment un triplement de la production actuelle. Ce qui cadre parfaitement avec la phase 3 de notre vision de croissance.
Quelle analyste faites-vous des tendances actuelles du marché de l’or à l’international ?
Le prix de l’or a atteint un record de plus de 1900 $ l’once il y a quelques années et le monde était préoccupé par l’inflation provoquée par la politique monétaire des banques centrales. Les cours de l’or sont redescendus à hauteur de 1.200 $ l’once au moment où les craintes d’inflation se sont dissipées et que la croissance économique mondiale a chuté. À plus long terme, nous croyons que les prix de l’or vont augmenter en raison du taux d’approvisionnement bas des mines et de la hausse continue de la demande, mais pour le moment, le secteur aurifère, à l’image des autres secteurs des matières premières est sous forte pression.
Propos recueillis par Albert SAVANA