Le 24 octobre dernier, la Côte d’Ivoire a dévoilé sa stratégie nationale de digitalisation de l’éducation 2024-2028. Ce programme ambitieux, dont le budget s’élève à 229,8 milliards de FCFA, vient couronner plus d’une décennie d’efforts visant à reconstruire et moderniser un système éducatif longtemps affaibli par les crises.
Répondre aux besoins croissants d’un secteur en pleine mutation
En 2011, après une décennie marquée par des crises politiques et économiques, le système éducatif, caractérisé par des infrastructures vétustes, des classes surchargées et des disparités régionales persistantes, se trouvait à bout de souffle. Entre 2011 et 2023, une réponse massive impliquant la construction de plus de 37 700 salles d’école primaire, contre 14 302 entre 2000 et 2011, a amorcé une période de changement. En 2024, le nombre total d’établissements publics s’établit à 902, soit une augmentation de plus de 200 % par rapport à 2011. Dans les régions rurales, grâce aux collèges de proximité, 90 % des élèves parcourent désormais moins de trois kilomètres pour se rendre en classe. Une proximité qui a permis de freiner l’abandon scolaire dans des zones historiquement délaissées.
L’école pour tous : de l’éducation obligatoire à la distribution de kits scolaires
Adoptée en 2015 sous l’impulsion d’Alassane Ouattara, la loi rendant l’éducation obligatoire pour les enfants de 6 à 16 ans constitue l’une des réformes majeures de la décennie. Cette mesure a permis d’accroître significativement le taux brut de scolarisation, passé de 89,3 % en 2011-2012 à des niveaux records aujourd’hui.
Lors de sa dernière investiture en 2020, Alassane Ouattara a réaffirmé son engagement dans ce secteur : « Au cours de ce nouveau mandat (…) la priorité de notre action sera centrée sur l’éducation, la formation et l’emploi des jeunes. Je réaffirme mon engagement en faveur de l’école obligatoire et la gratuité de l’école publique pour les enfants de 6 à 16 ans. Nous veillerons à ce que la transformation structurelle de notre économie soit créatrice de plus d’emplois pour nos jeunes diplômés ».
Pour garantir une réelle égalité des chances, Abidjan a mis en place un programme de distribution de kits scolaires gratuits. Entre 2011 et 2024, plus de 50 millions de kits ont été fournis aux élèves, pour un coût total d’environ 130 milliards de FCFA.
Formation professionnelle et enseignement supérieur : des leviers pour l’économie ivoirienne
Longtemps relégué au second plan, le secteur de l’enseignement technique et professionnel a également connu une mutation avec l’allocation de 217 milliards de FCFA pour la construction de 19 établissements à travers le pays. En parallèle, le programme « École de la Deuxième Chance » a été mis en place pour venir en aide aux personnes sans emploi ou mal insérées. À l’horizon 2030, ce programme ambitionne d’accompagner un million de bénéficiaires, avec une étape intermédiaire de 400 000 personnes sur la période 2022-2024.
L’enseignement supérieur, de son côté, a fait peau neuve. En 2024, le pays compte neuf universités publiques, contre seulement trois en 2011. Cette transformation a permis de faire passer la population estudiantine, de 203 555 étudiants en 2016 à 323 465 en 2023. Cette dynamique s’est accompagnée d’un renforcement significatif des ressources humaines avec le recrutement de 6 270 nouveaux enseignants et enseignants-chercheurs entre 2011 et 2023, contre 1 288 recrutés durant la décennie 2000-2010.
L’Institut National Polytechnique Félix Houphouët-Boigny (INP-HB), souvent cité comme une référence régionale, s’est imposé comme un centre d’excellence. En 2024, la remise des diplômes de la cinquième promotion de l’International Data Science Institute est venue confirmer cette dynamique. Des profils pointus, formés dans les métiers d’avenir comme les sciences des données et la technologie, sont désormais prêts à contribuer au développement économique du pays.
Des défis persistants, mais des solutions en marche
Malgré des progrès tangibles, des défis persistent. Le taux d’analphabétisme chez les adultes reste élevé, et des disparités subsistent entre les régions. Pour autant, les investissements dans l’éducation se poursuivent.
En 2024, le budget alloué à l’éducation atteint 1236 milliards FCFA (environ 2,4 milliards de dollars). Il permettra de construire 118 écoles préscolaires, 279 écoles primaires et 79 collèges supplémentaires, mais également d’améliorer la qualité de l’enseignement et les conditions de travail des enseignants.
Si pour Alassane Ouattara, « l’éducation reste au cœur » de sa vision, il reste à transformer les acquis en fondations durables. Dans un pays où 41 % de la population a moins de 15 ans, l’éducation est plus qu’une priorité : c’est un pari sur l’avenir.