Le plus souvent lié aux activités humaines, le fléau des déchets plastiques est une préoccupation des plus urgentes à l’échelle mondiale. Outre les dégâts infligés aux écosystèmes, ils endommagent les infrastructures et ralentissent pêche et activités touristiques en Afrique.
Selon les chiffres du Programmes des Nations Unies pour l’Environnement, chaque année, ce sont 8 millions de tonnes de plastiques qui se retrouvent dans l’océan, provoquant des dommages considérables à la faune et à la flore marines, à la pêche, au tourisme ou encore aux infrastructures urbaines. Ce sont également 100 000 mammifères marins et 1 million d’oiseaux de mer qui perdent chaque année la vie à cause des déchets plastiques. Les dommages causés à l’environnement sont aggravés par les menaces réelles que cette situation fait peser sur la santé des populations humaines avec les microplastiques consommés par les poissons qui finissent dans nos assiettes. A l’échelle mondiale, le préjudice subi par les écosystèmes marins à cause des déchets plastiques est estimé chaque année à 8 milliards de dollars.
UN LOURD FARDEAU POUR LES ECONOMIES AFRICAINES
Le plastique, mal absolu et frein au développement des nations africaines a envahi le continent depuis les années 50. Depuis, il n’a de cesse de compromettre la vie quotidienne de millions d’Africains de même qu’il constitue un frein au développement de plusieurs secteurs de l’économie : tourisme, pêche, hôtellerie… Le prix payé en termes d’opportunités économiques manquées et de dommages majeurs causés aux infrastructures est élevé pour des nations africaines faisant déjà face à de nombreux défis. Obstruées par des ordures sauvages composées notamment de plastiques, les canalisations ne sont pas en en mesure d’évacuer les eaux de pluie. Cette situation explique en partie les lourdes pertes en vies humaines suites aux inondations comme ce fut le cas en Sierra Leone en août 2017 (plus de 500 morts). Le Ghana y a également été confronté en 2015 avec près de 150 morts. Plusieurs autres pays avaient fait face au même phénomène avec des bilans moins lourds en pertes humaines cependant (Niger, Nigeria, Burkina Faso, Mauritanie…). Plus récemment, en juin 2018, la ville d’Abidjan (Côte d’Ivoire) a été confrontée à des pluies diluviennes qui ont plongé plusieurs quartiers sous les eaux pendant plusieurs jours et provoqué une vingtaine de décès. L’impact des inondations sur la productivité et sur le produit intérieur brut, bien que non chiffré, est considérable.
PRISE DE CONSCIENCE ET MOYENS D’ACTION
Le choix de la lutte contre les déchets plastiques comme thème de la journée mondiale de l’environnement cette année est une opportunité nouvelle pour prendre la bonne mesure de l’ampleur du phénomène et envisager des mesures fortes pour lui faire face surtout sur le continent africain. Pour cela, il importe de considérer le phénomène avec courage et lucidité. Quelques outils peuvent y aider. En changeant de perspective pour considérer l’océan comme un gisement d’opportunités à travers « une vision bleue de l’économie ». Cela consistera à viser la prospérité économique, le bien-être social, culturel et environnemental à travers une gestion durable des ressources maritimes et côtières (mise en œuvre des principes de l’économie bleue). Et pour un meilleur aménagement des zones d’activités économiques concernées, la Planification Spatiale Maritime ouvre de larges perspectives aux économies des pays africains côtiers. Dans sa zone d’intervention, la Convention d’Abidjan a eu recours à cet outil pour concilier les positions d’acteurs aux intérêts potentiellement conflictuels. La démarche permet d’affecter à chacun des secteurs (transport maritime, pêche, tourisme…) des zones marines propres, aboutissement d’un dialogue ouvert et transparent entre les différents usagers d’un même espace marin. Dans cette expérience, la Convention d’Abidjan a développé des partenariats avec des structures comme Grid-Arendal à travers le projet Mami Wata ou encore USAID à travers le projet WABICC. Plus récemment encore, le PNUE et la Fondation Ellen MacArthur ont annoncé une nouvelle initiative (New Plastics Economy Global Commitment) pour promouvoir une économie circulaire autour des déchets plastiques.
En initiant une politique de gestion durable des ressources disponibles et en changeant de regard sur les potentialités de l’économie bleue, les pays africains s’offriraient une opportunité de vaincre le signe indien et le paradoxe qui consiste à laisser dans la pauvreté des populations assises sur d’inestimables richesses.
Dr Abdoulaye Diagana
Chercheur associé à l’Université de l’Arizona
Chef unité Partenariats, Communication et mobilisations des ressources
PNUE/Convention d’Abidjan