Par Adama Wade.
L’abrogation de la loi Dodd-Franck par Donald Trump sera certainement au menu du 6e Forum de Haut niveau de Tana sur la Sécurité en Afrique. Prévu à Bahir Dar, en Ethiopie, du 22 au 23 avril 2017, la rencontre présidée par l’ancien président nigérian Olesegun Obasanjo, traite d’un sujet qui intéresse l’ensemble des 54 pays africains : « Gouvernance des ressources naturelles en Afrique. » Les leaders africains insisteront sur la nécessité de la transparence des contrats et concessions conclus avec les multinationales et la traçabilité des recettes issues de l’industrie extractive.
Or, alors que le forum se rapproche, l’Amérique vient de faire un grand pas en arrière en matière de transparence de ses multinationales. En effet, le 45ème président de la première puissance économique du monde a, en date du 3 février, ordonné au Trésor l’allégement de l’article 1502 de la loi Dodd-Franck dans un délai de 120 jours.
Votée en 2010 pour réguler le secteur bancaire et financier sous l’administration Obama, cette loi obligeait les entreprises américaines enregistrées auprès de la Security of Exchange, à révéler l’origine de leurs sources d’approvisionnement en or et autres minéraux issus potentiellement de zones en conflits. Dans les pays d’exploitation des ressources naturelles, la loi américaine s’était traduite par la certification des sites miniers de coltan, or et autres minerais entrant dans la fabrication des pièces électroniques et aéronautiques.
La perspective d’une telle suspension soulève un tollé auprès de la société civile. Quarante-et-une ONG de Goma, dans la province du Nord-Kivu, en RDC, ont adressé un mémo à l’administration Trump, lui demandant de maintenir dans sa forme actuelle la loi Dodd Frank.
L’ONG américaine Human Right Watch (HRW) estime, dans un communiqué du 10 février, que la suspension de cette règle risquerait d’enrichir des groupes armés aux pratiques abusives qui contrôlent une grande partie des zones minières notamment en République démocratique du Congo (RDC). « Cela saperait les efforts positifs déployés pour éliminer les minéraux issus de zones de conflit de la chaîne d’approvisionnement des grandes entreprises. Le commerce de ces minéraux a enrichi les groupes armés aux pratiques abusives en RD Congo et dans les pays voisins », a déclaré Human Right Watch. Autant dire que le 6ème forum de Tana dédié à la transparence de la gestion des ressources naturelles pourrait difficilement s’affranchir de l’ombre de Donald Trump.
A propos du 6ème forum de Tana
C’est la présidente du Liberia, Ellen Johnson Sirleaf, qui sera la Conférencière d’honneur de l’édition 2017 du forum de Tana. Egalement Présidente de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), le prix Nobel de la Paix 2011 vient d’un pays victime par le passé des appétits de groupes armés se battant pour le contrôle des ressources. Avoir la Présidente Ellen Johnson Sirleaf comme conférencière d’honneur est un grand succès pour le Forum », a déclaré Michelle Ndiaye, Chef du Secrétariat du Forum Tana. « Elle peut utiliser son leadership pour mettre en exergue le rôle de l’Etat dans la gouvernance des ressources naturelles et appeler à une bonne participation des femmes à tous les débats qui mettent l’accent sur l’utilisation des ressources naturelles en Afrique ».
Organisé chaque année dans la ville de Bahir Dar, dans le nord de l’Ethiopie, le Forum de Haut Niveau de Tana est un rassemblement informel de chefs d’Etat et de gouvernement ; de dirigeants d’organisations régionales ; de la société civile ; du secteur privé ; et d’éminents universitaires et praticiens. Le thème de cette année, ‘La gouvernance des ressources naturelles en Afrique’, vise à réfléchir sur la centralité des ressources naturelles, aussi bien dans la période historique que contemporaine, pour comprendre les implications profondes des relations entre l’Etat et la société sur le continent, et la position désavantageuse de l’Afrique dans la production et les échanges mondiaux
Arrêt sur image
Un petit déjeuner studieux en marge de la Conférence annuelle de Munich sur la Sécurité qui s’est tenue du 17 au 19 février 2017. Animé par le Président de 5 ans du Forum, S.E. Olusegun Obasanjo, les participants ont parlé du «Concours Mondial pour les Ressources Naturelles: Perspectives du Nord-Sud», ce qui est aussi le thème du Forum de Tana de cette année.