Dans son livre nouvellement paru chez l’Harmattan sous le titre «Politiques monétaire de change/ Le Franc CFA, un choix optimal pour l’Union monétaire ouest-africaine»,Bassambié Franck Bationo nous entraine à la découverte de la monnaie et de l’architecture monétaire et financière nécessaire à son équilibre.
Cadre à la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), spécialiste en monnaie, finance et intégration générale, l’essayiste parcourt en fin connaisseur les différents régimes de change, questionne leur pertinence et les stratégies de mise en œuvre de la politique monétaire commune.
L’intérêt de l’ouvrage, rédigé par un économiste alliant théorie et pratique, réside dans sa portée pédagogique et les efforts de l’auteur à vulgariser les notions complexes mais aussi dans la distance prise par rapport à l’actualité brute.
L’analyse revient sur l’expérience longue de la BCEAO dans la réalisation de son premier objectif, la lutte contre l’inflation et, depuis la grande crise financière de 2008, la stabilité financière, laquelle concerne plusieurs acteurs.
«La stabilité financière est un concept relativement récent lié à la mondialisation», écrit le cadre d’origine burkinabé qui s’interroge à bon escient sur la question de la pertinence du cumul de la fonction monétaire et celle de supervision bancaire.
Autre thème abordé, celui du régime de change,analysé de la date de signature du traité instituant le Franc de la communauté financière africaine (FCFA), en 1962, à nos jours, en passant par la dévaluation de 1994. Ayant souci de vulgariser,Bassambié Franck Bationo passe en revue les différents régimes de change dans le monde et en Afrique, présente leurs avantages et inconvénients le longs de tableaux et de graphes, fruits d’une documentation riche.
L’auteur passe aussi en revue l’évolution des mécanismes d’intervention de la BCEAO à travers les réformes des différents dispositifs de politique monétaire et les interactions avec les 137 établissements de crédit agréés de l’UEMOA ainsi qu’avec les Trésors des pays membres . La fixation du taux directeur, canal de transmission de la politique monétaire, décidée par le comité monétaire, vise plusieurs objectifs macroéconomiques de stabilité du crédit et, de manière plus large, du prix.
Une oeuvre de salubrité publique
L’on notera que le nombre de banques commerciales dans l’Union est passé de 66 à 122 entre 1991 et 2015, et que les dépôts sont passés de 16,4 % à 35,3% du PIB. Dans cet intervalle, l’encours des crédits à la clientèle à stagné autour de 28% du PIB . Un frein? C’est sans doute là , sur l’octroi du crédit, que l’Union présenterait les statistiques les plus faibles ?
Non, semble dire l’auteur qui note que 88% des entreprises formelles sont entièrement ou partiellement , dépendantes du crédit bancaire pour l’activité courante et 93% pour l’activité d’investissement. Les comparaisons avec les pays de la sous région sont en général à l’avantage de l’UEMOA sur tout ce qui concerne le crédit. Ainsi, en 2016 l’encours crédit au secteur privé rapporté au PIB était de 28,3% dans l’Union contre 15,3% pour la CEMAC (Communauté économique et monétaire de l’Afrique Centrale), 18,9% au Ghana, 15,4% au Nigéria et 22,2% en Afrique de l’Est. L’Afrique du Sud restant, avec 70%, le modèle le plus abouti.
Bref, ces 300 pages d’arguments scientifiques sur la monnaie, le change, le système bancaire et l’intégration économique, font œuvre de salubrité publique tant le débat actuel sur le Franc CFA est clivant, sujet à toutes les interrogations politiques, économiques, sociologiques et philosophiques de Dakar à Cotonou. De lui même, le lecteur répondra à la fin de l’ouvrage sur la question posée dès le départ, à savoir si le Franc CFA était un choix optimal.
A propos de l’auteur
Bassambié Franck Bationo a occupé plusieurs fonctions à la BCEAO dont celles de Directeur Général de l’Economie et de la Monnaie (DGEM), conseiller du DGEM, Directeur de la Recherche et Directeur des Statistiques. Il a assuré des enseignements au COFEB, au CESAG et à l’Université de Ouagadougou. Il est titulaire d’un doctorat (PHD) en sciences économiques de l’Université Paris Dauphine (PSL), d’un DEA en politiques économiques et sociales de l’Université Pierre-Mendès France, d’un DESS en marketing et gestion commerciale de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar et d’un diplôme d’ingénieur statisticien de l’ENSEA d’Abidjan et d’une Maîtrise en sciences économiques de l’Université de Ouagadougou.