« Il n’est pas évident pour une femme africaine de réussir «
Propos recueillis par Dia El Hadj Ibrahima, envoyé spécial à Bruxelles.
Coumba Gawlo Seck appartient sans conteste à cette race d’artistes engagés, celle qui chante pour les causes nobles et milite pour une Afrique nouvelle, débarrassée des préjugés et donnant à la femme toute sa place. En marge de la quatrième édition du Rebranding Africa Forum, qui se tient le 6 octobre à Bruxelles, la plus célèbre des cantatrices sénégalaises a accordé un entretien exclusif à Financial Afrik dans ce qui constitue une rencontre inédite entre l’art et la finance.
Vous êtes artiste et ambassadrice de bonne volonté. Quelle est votre vision de la femme africaine de demain ?
Je suis convaincue que la femme africaine de demain sera celle d’aujourd’hui plus quelque chose. Plus indépendante, toujours dynamique et engagée. En fait, une femme qui s’assume et sait assumer. Une femme qui en veut et qui prend ses responsabilités. Une femme beaucoup plus forte, autonome et libre dans le bon sens. Une femme ouverte et imposante. Globalement, la femme de demain sera une femme allant au devant de ses ambitions sans les obstacles culturels de nos sociétés conservatrices.
Qu’est ce qui justifie votre motivation à soutenir le programme du dividende démographique en Afrique ?
Je me suis engagée dans la promotion du programme de dividende démographique en Afrique pour plusieurs raisons. A mon avis, ce programme est riche du point de vue culturel, social et économique. Il donne de la valeur à toutes les femmes puisqu’il plaide pour leur autonomisation, leur indépendance et surtout il les conscientise à maîtriser leur natalité et l’espacement de leur naissance. Pour les jeunes, ce programme contribue à les accompagner dans le changement de comportement et l’implication dans la marche de la société . C’est un projet où l’on retrouve des aspects sur l’éducation, la santé, l’économie et même sur la société et la culture.
L’entreprenariat féminin en Afrique s’impose fort aujourd’hui. Pouvez-vous revenir sur les grands moments qui ont marqué votre vie en tant qu’artiste au départ et chef d’entreprise aujourd’hui ?
J’ai une chance extraordinaire d’avoir fait une grande carrière. J’ai démarré très tôt. Ça c’est vrai, j’ai pas eu de répit. C’est la rançon de la gloire comme dit l’autre , le prix à payer pour réussir dans la vie. J’ai dû au fil des années me battre pour y arriver. Affronter les préjugés tenaces de la société, faire avec les difficultés de la vie et surtout avec les tabous. Avec le recul, je dirai qu’il n’est pas évident pour une femme africaine de réussir. Il a fallu travailler d’arrache pied, prendre beaucoup sur soi et recevoir des coups. Mais surtout, il faut savoir résister et avancer sans perdre de temps. Je pense aujourd’hui que la somme de mes expériences m’a finalement permis d’arriver à là où je suis. L’entreprenariat et le leadership féminin méritent d’être développés car ce sont des moteurs de la transformation sociale. Les femmes africaines sont entreprenantes, très dynamiques et contribuent beaucoup à l’équilibre de la famille. Elles méritent d’être soutenues et encouragées dans ce qu’elles entament.
Nous avons tendance à croire que toutes les femmes Sénégalaises sont politiciennes de nature. Qu’en est-il de Coumba Gawlo ?
(Rires…). Cela dépend de ce que vous sous-entendez par politique. Est-ce que vous parlez de la politique politicienne ou d’autre chose? Ce que je suis entrain de faire pourrait être taxé de politique car je suis actuellement dans la voie de la politique de développement pour lutter contre la pauvreté, pour sensibiliser sur l’importance capitale de l’éducation, celle des jeunes filles en particulier, pour lutter contre les mariages précoces, pour accompagner les initiatives favorisant la création d’emplois pour les jeunes mais aussi promouvoir l’engagement de soi-même. Maintenant si c’est cela faire de la politique, sachez que je suis cataloguée de vraie politicienne.
Vous avez lancé un groupe média, il y a presque une année. Parlez nous de ce projet et de ses objectifs…
Effectivement, j’ai lancé un groupe média dénommé Go média qui est le diminutif de Gawlo Office Média. L’objectif est d’une part de contribuer au débat entre les populations mais d’autre part, de rehausser le niveau des programmes. Nous avons constaté que les médias au Sénégal sont plus focalisés sur le divertissement plutôt que sur le développement. Il y a peu de programmes de culture générale, peu ou pas du tout de programmes portant sur les valeurs. Il n’y a pas d’émissions ciblant les jeunes et les incitant à s’impliquer dans les questions essentielles du pays ou du continent. Ce sont ces différentes raisons qui m’ont permis de lancer ce projet avec une radio FEM FM, un portail d’informations générales Go Dakar et bientôt une chaine de TV.
Propos recueillis par Dia El Hadj Ibrahima