La fusion entre Sanlam et Allianz, qui a reçu quelques avis favorables de la Commission régionale de contrôle des assurances (CRCA) de la Conférence interafricaine des marchés d’assurance (CIMA) le 17 février 2024, est actuellement en cours d’implémentation. Le PDG de Sanlam-Allianz, Heinie Werth, supervise la compagnie d’assurance panafricaine depuis le Cap, avec la burkinabé Delphine TRAORE à la tête de la division Assurances Générales de la coentreprise, et le sud-africain Robert Dommisse en charge de la division VIE. Les deux lieutenants seraient, au delà de leur mission, en compétition underground pour la place de Heinie Werth. Ce dernier, qui devrait partir d’ici juin 2025, serait-il motivé par son extra bonus lié à la finalisation de la JV ?
Le gain ou la perte de valeur éventuelle liée à ce mariage n’est donc pas le seul paramètre de cette fusion qu’il faudra évaluer aussi sur les potentiels conflits d’agence et les ambitions humaines. Dans le cadre de la consolidation des entités du groupe et des opérations pays, plusieurs cadres supérieurs, dont des managers, ont été remplacés. Un processus qui n’est pas sans grincement de dents. De l’avis des sources bien informées, les postes pourvus n’ont pas donné lieu à l’ouverture d’une procédure de sélection. « Il est important de garder à l’esprit qu’Allianz et Sanlam sont des sociétés cotées en bourse et, à ce titre, elles sont censées faire preuve d’une conduite exemplaire et adhérer à un processus d’évaluation rigoureux et transparent qui profite en fin de compte à leurs actionnaires et non à des intérêts personnels », opine un avocat d’affaires spécialiste du droit du travail.
En tout cas, les changements imprévus qui se sont produits ont pris de court les employés, les marchés et les autorités réglementaires. Ce fut une surprise de la part des observateurs de découvrir que plusieurs cadres de haut rang au sein du groupe, tant au siège central de Casablanca que dans les filiales, ont été remerciés et ce malgré une année 2023 exceptionnelle. Prenons par exemple la situation en Côte d’Ivoire, où les dirigeants de Sanlam Non-Vie Côte d’Ivoire (le DG et deux DGA) ont brutalement quitté une filiale qui générait près de 60 milliards de FCFA, soit presque le double des activités d’Allianz Côte d’Ivoire Non-Vie. Des actions similaires sont prises au Cameroun et au Sénégal, et il est prévu de les poursuivre ainsi dans d’autres pays. Le vent de changement n’épargne pas le Maroc où l’influente Aïcha Lebsir, Régional Head Marketing du Groupe, aurait été priée de faire ses cartons. De même, Aline Chambaret, la DRH de SanlamAllianz GI, avec 20 ans d’ancienneté au compteur, est sur le départ, poussée vers la porte.
Ainsi, aux défis inhérents à toute fusion, comme l’intégration des outils informatiques (chantier à surveiller), s’ajoute la question de la cohérence management des ressources humaines et de la consolidation des rapports avec les courtiers. Ceux-ci craignent un impact sur la qualité du servicing en raison de l’imposition du modèle d’Allianz en lieu et place de celui de Sanlam. La joint-venture s’est faite, rappelons-le, sur une absorption des filiales de Sanlam par celles d’Allianz, ce qui n’est pas sans impact sur la méthode d’évaluation retenue et les modes de calcul. En attendant les derniers feu verts de certains régulateurs, ce dossier de fusion suscite plus de questions qu’il ne fournit de réponses. Le mariage des deux géants a-t-il pour ambition de consolider et de développer ou, au contraire, de profiter d’une évaluation somme toute basse, pour revendre certaines filiales « brinquebalantes » et réaliser de gains substantiels ? Wait and see .