Par Pr Benoit Ngom*, président de l’Académie Diplomatique Africaine
Le 30 Novembre dernier la communauté des pays de l’Espace francophone a élu Madame Michaelle Jean, Secrétaire Général de l’OIF. L’élection de la nouvelle Secrétaire Générale ne fut pas de tout repos mais bien au contraire. En effet, pour la première fois, contrairement au souhait des participants, il n’y a pas eu de consensus.
Toutefois, la Francophonie a un nouveau visage, Mme Michaelle Jean , Recteur de l’Université d’Ottawa, d’origine haïtienne , ex Gouverneur Général du Canada, pays membre du G8 qui s’est longtemps distingué dans les actions en faveur du développement de l’Afrique.
L’accession de Madame Jean au Secrétariat Général de l’OIF peut offrir plusieurs opportunités à l’Afrique francophone. Elle va contribuer a mettre fin a la monotonie de ce face à face souvent décrié entre le Chef d’Etat de la France, puissance coloniale, et certains dirigeants africains pour lesquels l’opinion publique française voire internationale n’a souvent aucune considération.
Une situation qui a favorisé la permanence de la «France Afrique», réseaux composites de français défendant des intérêts les plus mercantiles et d’africains peu sensibles aux exigences patriotiques.
Ce mandat va sûrement favoriser l’ouverture de la Francophonie vers de nouveaux espaces dans lesquels bat le pouls économique du Monde, notamment vers l’Amérique du Nord et l’Asie. A cet égard, il convient de souligner que la Francophonie n’est pas le monopole des Africains.
Madame Jean à la direction de l’OIF aura aussi, sans nul doute, un effet positif sur le renforcement des liens entre l’Afrique et le Canada, pays qui est actuellement le pole d’attraction d’une bonne partie de la jeune élite africaine francophone soucieuse de poursuivre des études supérieures. La présence de ces jeunes au Canada pourra leur offrir l’opportunité de voir comment la langue peut être, comme dans le cas du Québec, utilisée en un outil de développement économique et culturel et constituer un point de référence majeur pour la croissance et l’affirmation d’une nation.
Une personnalité issue de la diaspora africaine à la tête de la Francophonie ne pourra pas manquer de pousser les pays d’Afrique francophone parfois amnésiques à s’interroger d’avantage sur leurs liens avec leur descendance d’Amérique et surtout d’Haïti, la première République noire.
C’est pourquoi, rétrospectivement, cet événement nous invite à nous rappeler le geste plein de symbole qui fut posé par l’ancien Président du Sénégal, Abdoulaye Wade, en accueillant des dizaines d’étudiants haïtiens dans les universités sénégalaises à la suite du tremblement de terre.
Enfin, les partisans de l’égalité des sexes et de la parité entre Hommes et Femmes ne peuvent que se réjouir de l’élection de Madame JEAN . Cet événement survenu au Sénégal peut être perçu comme un hommage rendu à ce pays qui a adopté la parité intégrale dans les fonctions publiques électives et dont l’Assemblée Nationale a été composée sur cette base.
En conclusion, le départ de Monsieur Abdou Diouf, à qui le XVe Sommet a unanimement rendu hommage, marque un tournant dans la vie de l’Organisation caractérisée par le symbole que représente l’arrivée pour la première fois a sa tête d’une femme issue de la Diaspora africaine et aussi par l’apparition d’une sorte d’entente pour une nouvelle francophonie entre Madame Michaelle Jean , les présidents François Hollande de France et Macky Sall du Sénégal qui assure la présidence de l’Organisation.
Ces trois personnalités peuvent valablement contribuer a l’exercice d’un magistère d’influence susceptible d’assurer un Renouveau de la Francophonie au service de la Paix, de la Fraternité et du développement harmonieux de l’Afrique et du reste du Monde.
*L’Academie Diplomatique Africaine (ADA) est un réseau de diplomates africains et internationaux affiliés à la CEDEAO et à divers organismes. Le 5 décembre, Financial Afrik et ADA ont conclu un partenariat pour le lancement d’une revue diplomatique.