Réunies à Dakar ce mercredi 21 mai sous l’égide de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’ouest (BCEAO), les banques centrales africaines et experts en intelligence artificielle (IA) ont amorcé une réflexion approfondie sur l’intégration de l’IA dans les politiques publiques et les systèmes financiers. Cette démarche s’inscrit dans une volonté d’échange sur les applications concrètes de l’IA et les innovations associées, notamment dans les secteurs bancaire et financier, en particulier au sein des banques centrales et des organes de régulation.
Dès l’ouverture des travaux, les dynamiques continentales en matière d’intelligence artificielle ainsi que les enjeux propres au secteur bancaire ont été mis en lumière.
Désormais capable d’exécuter des tâches complexes avec une rapidité et une précision remarquables, l’intelligence artificielle s’impose comme un levier stratégique d’innovation. Elle permet d’accélérer les processus de production et d’améliorer significativement la qualité des services, tant dans le secteur public que privé.
L’IA, moteur d’innovation pour les économies africaines
Selon les estimations des Nations unies, l’IA pourrait générer jusqu’à 1 500 milliards de dollars de valeur ajoutée pour l’économie africaine d’ici à 2030, en stimulant la croissance, en favorisant la création d’emplois et en ouvrant de nouvelles opportunités pour les populations du continent.
« L’année 2025 a déjà été marquée par plusieurs rendez-vous majeurs, dont le premier Sommet mondial de l’intelligence artificielle en Afrique, organisé à Kigali. Ces événements illustrent à la fois l’intérêt croissant pour cette technologie et la volonté de l’Afrique de ne pas se limiter au rôle de simple consommateur, mais de devenir un acteur à part entière de la révolution numérique », a déclaré Cheikh Diba, ministre sénégalais des Finances et du Budget à l’ouverture des travaux.
Des stratégies nationales en gestation dans l’Uemoa
Au sein de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa), plusieurs États ont d’ores et déjà engagé l’élaboration de stratégies nationales visant à structurer l’usage de l’IA. L’objectif est de bâtir un environnement propice à l’innovation, de moderniser les services publics et de renforcer la compétitivité des économies dans des secteurs à fort impact socio-économique, tels que l’agriculture, la santé, l’éducation ou encore l’administration.
M. Diba a fait savoir que le Sénégal, pour sa part, affirme clairement ses ambitions à travers sa stratégie numérique baptisée New Deal Technologique. Cette feuille de route vise à développer des solutions technologiques locales, sécuriser les infrastructures numériques, accélérer la digitalisation de l’administration, garantir un accès universel à Internet, promouvoir l’émergence de champions numériques et instaurer une identité numérique biométrique. Elle s’articule également avec l’initiative panafricaine Artificial Intelligence for Africa.
« Enjeu stratégique » pour les banques centrales
Pour le gouverneur de la BCEAO, Jean-Claude Kassi Brou, l’intelligence artificielle représente désormais un enjeu stratégique pour les banques centrales. Bien que son déploiement dans ces institutions soit encore à un stade précoce, plusieurs d’entre elles affichent une volonté résolue de s’approprier cette technologie afin d’accompagner la transformation du secteur financier.
« Consciente de ces enjeux, la BCEAO a mis en place, en juillet 2024, un Comité de Réflexion sur l’Intelligence Artificielle (CRIA), chargé de proposer une feuille de route pour une intégration progressive et maîtrisée de l’IA au sein de l’institution. Le comité a pour mission d’identifier les bénéfices attendus, ainsi que les prérequis nécessaires à son adoption efficace », a-t-il rappelé.
Et de conclure : « l’intelligence artificielle ouvre des perspectives remarquables pour les institutions financières. Mais, comme toute avancée technologique, elle soulève également des défis en matière de gouvernance, d’éthique, de protection des données et de gestion des risques. Il est essentiel de les anticiper pour garantir un usage responsable et sécurisé. »
Les travaux engagés à Dakar s’articulent autour de plusieurs thématiques clés : le potentiel transformateur de l’IA, son application pour améliorer la précision des modèles économiques et affiner les décisions de politique monétaire, son impact sur la stabilité financière, ainsi que les enjeux liés aux ressources humaines et aux questions éthiques.