Le Bureau des gouverneurs de l’Association des banques centrales africaines (ABCA) a entamé, ce mardi 20 mai, sa première réunion statutaire de l’année au siège de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) à Dakar (Sénégal). Les échanges portent principalement sur le Programme de coopération monétaire en Afrique (PCMA) et sur les avancées relatives à la création de la Banque centrale africaine.
Présidée par Rama Sithanen, gouverneur de la Bank of Mauritius et président de l’association, la session a été l’occasion d’aborder les défis macroéconomiques actuels et les perspectives d’intégration régionale. Dans son allocution d’ouverture, M. Sithanen a mis en lumière l’impact des tensions géopolitiques mondiales, qu’il estime responsables d’une fragmentation accrue, d’une inflation persistante et d’une baisse significative des échanges commerciaux.
« L’Afrique reste dépendante de l’aide au développement, qui sera inévitablement affectée. Avec la prépondérance du dollar dans les échanges, nous faisons face à une dépréciation de nos monnaies et à un alourdissement de la dette extérieure », a-t-il souligné. Insistant sur la nécessité urgente de reconstituer les réserves de change, ajoutant que la situation actuelle pourrait être une opportunité pour renforcer le commerce régional, encourager les investissements transfrontaliers et accélérer l’intégration continentale.
Avancées vers la Banque centrale africaine
Évoquant les projets phares de l’ABCA, notamment le PCMA et la future Banque centrale africaine, le président de l’association a rappelé leur importance stratégique. Il a annoncé que l’institution régionale de crédit devrait devenir opérationnelle dès le mois prochain, marquant une avancée concrète vers l’union monétaire africaine.
S’agissant de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), le gouverneur Sithanen l’a qualifiée de levier majeur pour l’intégration économique. Toutefois, il a déploré son manque d’efficacité actuelle, en raison de l’insuffisance d’infrastructures logistiques et frontalières, ainsi que du déficit de financement pour les PME/PMI, qui freine leur capacité à tirer pleinement parti du marché continental.
L’interconnexion des systèmes de paiement, l’autre priorité
En matière d’interconnexion des systèmes de paiement, le gouverneur de la banque centrale mauricienne a souligné l’impératif de leur intégration pour lutter contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, tout en rendant les transactions plus crédibles, rapides et accessibles. « Une fois cela accompli, le commerce intra-africain sera grandement facilité », a-t-il affirmé, en rappelant que l’Afrique subsaharienne figure parmi les régions où les coûts d’envoi de fonds sont les plus élevés, atteignant parfois 37 %. Il a exhorté les plateformes concernées à travailler à la réduction de ces coûts.
« L’Afrique dispose de la population jeune la plus importante au monde. Ces réformes sont essentielles pour favoriser leur épanouissement et promouvoir le développement. Le continent regorge de projets prometteurs, mais le manque de financement reste un frein majeur. Il nous faut mettre en place les réformes nécessaires pour attirer les investisseurs et mobiliser les ressources internes », a-t-il conclu.
Quid des appuis institutionnels pour une intégration renforcée
Prenant la parole, le gouverneur de la BCEAO, Jean-Claude Kassi Brou, a réaffirmé l’engagement de son institution à accompagner les initiatives de l’ABCA en faveur d’une coopération monétaire renforcée et d’une plus grande stabilité économique sur le continent.
Enfin, Dr. Patrick Ndzana Olomo, représentant de l’Union africaine et Directeur par intérim du Développement économique, de l’Intégration et du Commerce, a mis en avant la portée stratégique des initiatives entreprises en faveur de l’intégration monétaire.
« Les récentes réalisations importantes en vue de la création de la Banque centrale africaine, l’approbation du projet de statuts de l’Institut monétaire africain (IMA) et du Mécanisme africain de financement de la stabilité (MAFS) représentent une étape cruciale dans la mise en place des fondements institutionnels de l’intégration monétaire. Ce sont là des signes tangibles de notre engagement collectif en faveur de la vision à long terme d’une monnaie africaine unique et d’une politique monétaire unifiée », a-t-il déclaré avant de conclure : « nous sommes convaincus que la collaboration entre l’Union africaine et l’ABCA contribuera à façonner le narratif d’un continent en pleine transformation. »