Depuis 1948, la balance des paiements est établie selon une méthodologie internationale, élaborée par le Fonds Monétaire International et regroupée dans un « Manuel de la balance des paiements ». Elle s’est ainsi imposée, dès la mise en place du FMI, comme le document statistique de référence pour établir une vision globale et harmonisée du développement des échanges internationaux et pour en mesurer les équilibres et déséquilibres. Elle est établie depuis 2014 suivant la nouvelle méthodologie internationale de la 6e édition du manuel de la balance des paiements du FMI.
Présentation de la Balance des paiements
C’est est un tableau qui retrace l’ensemble des flux d’actifs réels, financiers et monétaires entres les résidents d’une économie et les non-résidents au cours d’une année ou une période déterminée. Elle est composée de trois comptes :
– le compte des transactions courantes qui enregistre les échanges de biens et services (exportations, importations, transport, voyages, revenus)
– le compte de capital qui enregistre les transferts en capital (dons en capital aux administrations publiques, remise de dette)
– et le compte financier qui enregistre les investissements directs et de portefeuille (crédits commerciaux, emprunts obligataires de l’Etat et du privé).
Chacun de ces comptes contient des postes et des rubriques (voir tableau 1). L’enregistrement des opérations se fait en crédit ou en débit. Dans le compte de transactions courantes et de capital, toute transaction qui se traduit par une entrée de devises est enregistrée en crédit (exemple des exportations ou l’envoi de fonds par les émigrés) ; et en débit, si elle se traduit par une sortie de devises (exemples des importations ou des intérêts de la dette extérieure). Un solde (crédit moins débit) positif indique un excédent des recettes sur les dépenses.
S’agissant des opérations financières, une dette ou (un engagement) est enregistrée au débit ; tandis qu’une créance ou (un avoir) sur le Reste du monde est enregistrée au crédit. Ainsi, lorsque les résidents ou l’Etat d’un pays s’endettent vis-à-vis du Reste Monde, pour des raisons commerciales ou par des mécanismes financiers (obligations par exemple), le compte financier est débité. Au même moment, le Reste Monde voit son compte financier crédité.
En résumé, Un solde positif du compte financier représente un accroissement des avoirs nets ou des créances nettes sur le Reste du Monde et un solde négatif signifie une diminution des avoirs nets.
En outre, la balance des paiements est, par construction, toujours en équilibre : la somme des soldes du compte des transactions courantes et de capital est égale, en tenant compte des erreurs et omissions, au solde du compte financier avec un signe opposé. ( voir tableau 1).
Lorsque, dans le langage courant, on parle de déficit ou d’excédent de la balance des paiements, on fait allusion au solde du compte des transactions courantes. Ce dernier est aussi appelé compte courant ou balance courante.
Exemple de la balance des paiements du Sénégal
Les définitions détaillées des comptes et postes sont données en annexe dans un glossaire. Pour la lecture, rappelons que la somme des soldes des postes d’un compte donné est égale au solde de ce compte. Exemple : le solde du compte des transactions courantes (-3457, 1) = -4540,8 – 558,3 + 1642,0.
Tableau 1 : Balance des paiements simplifié du Sénégal en 2022 – Milliards CFA.
Poste | Crédit | Débit | Solde |
Compte des transactions courantes | 6 918,6 | 10 375,8 | -3 457,1 |
Biens et services (exportations et importations) | 4 627,0 | 9 167,7 | -4 540,8 |
Revenu primaire | 338,3 | 896,6 | -558,3 |
Revenu secondaire | 1 953,3 | 311,4 | 1 642,0 |
Compte capital | 133,5 | 10,4 | 123,1 |
Poste | Avoirs | Engagements | Solde |
Compte financier | 213,2 | 3 485,2 | -3 272,0 |
Investissements directs | 43,7 | 1 826,8 | -1 783,1 |
Investissements de portefeuille | 17,1 | 545,5 | -528,3 |
Dérivés financiers | 0,0 | 0,0 | 0,0 |
Autres Investissements | 152,3 | 1 112,9 | -960,6 |
Erreurs et omissions | -6 524,9 | -6 532,3 | 7,4 |
Solde global | 314,0 | 368,6 | -54,6 |
Réévaluation | 1,8 | -5,8 | 7,6 |
Avoirs et engagements | -312,2 | -374,4 | 62,2 |
Source : Balance des paiements du Sénégal 2022, BCEAO 2023
Le poste de biens et services qu’on appelle balance commerciale a enregistré un déficit historique de 4 540 milliards CFA, pour un PIB de 17 228 milliards CFA, soit 26,35%. Ainsi, le déficit de la balance commerciale (4540,8 Mds CFA) est la principale cause du déficit de la balance des paiements courants (3457,1 Mds CFA).
Le poste du revenu primaire s’est dégradé pour se situer à -558,3 Milliards CFA en 2022, sous l’effet notamment de l’augmentation des revenus des investissements étrangers, en relation avec les intérêts dus au titre des capitaux investis dans le développement des projets pétroliers et gaziers, et l’augmentation des dividendes distribués. Il s’est également détérioré du fait des intérêts dus au titre de la dette extérieure publique.
Le poste du revenu secondaire est ressorti à 1642,0 Mds CFA contre 1571,4 Mds en 2021, du fait de la consolidation des envois de fonds des migrants (1553 Mds). Les transferts courants au profit de l’Etat (aides budgétaires) se sont redressés au cours de la période sous-revue, après la baisse enregistrée en 2021.
Le solde du compte de capital est ressorti à 123,1 Mds contre 122,3 Mds en 2021, en légère amélioration de 0,8 Md, en lien avec l’accroissement des transferts en capital au profit des administrations publiques.
Le solde des Investissements Directs Etrangers (IDE), 1783,2, s’est consolidé par rapport à l’année précédente, en relation avec l’augmentation des IDE observée notamment dans le cadre du financement des projets d’hydrocarbures.
Le profil des investissements de portefeuille, 528,3 Mds,traduit les mobilisations de fonds en 2022, en relation avec l’évolution des emprunts obligataires de l’Etat sur le marché financier sous régional. Il convient néanmoins de souligner que des entreprises privées ont levé sur le marché obligataire sous régional, un montant de 261,5 Mds pour le financement de projets de développement.
Le déficit des transactions courantes ou de la balance courante correspond au besoin de financement exprimé par une économie nationale et constitue, à cet égard, la principale source d’accumulation de dette extérieure (privée et publique). En 2022, le déficit de la balance courante s’élevait à 3 457,1 Mds CFA et pour le financer, le Sénégal avait bénéficié de dons en capital de 123, 1 Mds CFA, s’était endetté à hauteur 3272 Mds CFA et avait amélioré les avoirs extérieurs nets de la BCEAO et des autres institutions de crédit de 62,2 Mds CFA.
Comme nous venons de le voir, la balance des paiements dresse les comptes extérieurs d’une économie nationale pour une période déterminée, généralement égale à une année. Le compte des transactions courantes permet de savoir si une économie nationale a une capacité ou un besoin de financement vis-à-vis du Reste du Monde. Le compte financier explique comment une capacité de financement a été utilisée au profit du Reste du Monde ou comment un besoin de financement a été satisfait par le Reste du Monde. Pour approfondir l’analyse de la balance paiement d’un pays, l’observation sur plusieurs années est nécessaire, si l’on veut en tirer des enseignements économiques clefs.
ANNEXE : GLOSSAIRE
COMPTE DE CAPITAL : Le compte de capital enregistre les transferts en capital, c’est‑à‑dire les opérations qui donnent lieu au transfert de propriété d’un actif fixe ou à la remise d’un engagement par le créancier sans que rien ne soit reçu en échange (remises de dettes, pertes sur créances, aides à l’investissement, etc.) ainsi que les acquisitions/cessions d’actifs non financiers non produits (voir la définition).
CRÉDITS COMMERCIAUX ET AVANCES : Les crédits commerciaux et avances recouvrent les financements accordés par les entreprises résidentes à des clients non-résidents (avoirs) ou par les non‑résidents à des entreprises résidentes (engagements), quelle que soit l’échéance de ces crédits, ainsi que les avances payées à la commande. Les crédits commerciaux entre sociétés ayant une relation d’investissement direct figurent à la rubrique « Investissements directs » ; les autres crédits commerciaux sont enregistrés sous la rubrique « Autres investissements ».
ENTRÉES/SORTIES DE CAPITAUX : Dans le compte financier, les opérations d’augmentation des avoirs (achats d’actifs étrangers par des résidents) et de diminution des engagements correspondent à des sorties de capitaux. Inversement, les opérations de diminution des avoirs (cessions d’actifs étrangers par des résidents) ou d’augmentation des engagements (achats d’actifs résidents par des non‑résidents) correspondent à des entrées de capitaux. Un solde positif des flux du compte financier (accroissement des avoirs nets) représente des sorties nettes de capitaux, et un solde négatif des entrées nettes.
INVESTISSEMENTS DIRECTS : Les investissements directs couvrent les opérations effectuées par des investisseurs résidant dans une économie afin d’acquérir, d’accroître ou de liquider un intérêt durable dans une entreprise résidant dans une autre économie et de détenir ou de liquider une influence dans sa gestion.
PORTEFEUILLE (INVESTISSEMENTS DE) : Les investissements de portefeuille comprennent toutes les opérations sur titres négociables entre résidents et non‑résidents (achats à l’émission, négociations et remboursements), à l’exception des opérations comprises au sein des investissements directs, des avoirs de réserve et des instruments financiers dérivés.
REVENUS PRIMAIRES : Les revenus primaires représentent les flux qui reviennent aux agents économiques pour leur participation au processus de production (« Rémunérations des salariés »), pour la fourniture d’actifs financiers (« Revenus d’investissement ») ou pour la location de ressources naturelles (« Loyers »). Les impôts et subventions sur les produits et la production sont également inclus dans les revenus primaires.
REVENUS SECONDAIRES : Les revenus secondaires retracent les transferts courants entre résidents et non‑résidents. Un transfert est une écriture qui correspond à la fourniture d’un bien, d’un service, d’un actif financier ou d’un autre actif non produit sans la contrepartie d’un élément de valeur économique. Les transferts courants sont tous les transferts qui ne constituent pas des transferts en capital (cf. Compte de capital).
TRANSFERTS EN CAPITAL – REMISE DE DETTE : L’annulation d’une dette consentie par les administrations publiques françaises à un pays africain correspond à un transfert en faveur d’un agent non résident. À ce titre, elle est inscrite au débit du compte de capital de la France. En contrepartie, cette annulation de dette est inscrite au crédit du compte de capital du pays africain.
TRANSFERTS EN CAPITAL – AUTRES TRANSFERTS : Les autres transferts en capital rassemblent les aides à l’investissement reçues de l’étranger ou versées à des pays étrangers dans le cadre de l’aide au développement.