Les milieux ouest-africains des affaires viennent coup sur coup d’expérimenter la force de frappe de la Mauritius Commercial Bank (MCB). D’abord lors de l’opération de cession des activités ouest-africaines de Caterpillar, JA Delmas, à un consortium composé d’un investisseur ivoirien et d’un groupe du Moyen-Orient. Et, il y a à peine une semaine, lors du rachat par LBO de Nouvelle Mici Embaci en Côte d’Ivoire valorisée selon nos sources autour de 100 millions d’euros. Pour comprendre la philosophie de cette très ancienne institution née à Maurice en 1838, nous avons interviewé Ashvin Deena, Directeur des activités corporate à l’international.
D’abord qu’est-ce qui se cache derrière le sigle MCB ?
Il s’agit du groupe Mauritius Commercial Bank, fondée il y a 185 ans, leader des activités financières bancaires à Maurice, avec des filiales dans l’Océan Indien et des bureaux de représentation dans certains hubs régionaux. La MCB présente un total bilan de 18 milliards de dollars dont la moitié réalisée à l’international, principalement en Afrique. À l’international, nous développons des solutions corporate adaptées et accompagnons les multinationales, les entreprises locales et régionales, les fonds de capital investissement en nous appuyant sur les possibilités offertes par le centre financier mauricien. Nous sommes une des rares institutions financières en Afrique subsaharienne à détenir une notation investment grade, à savoir la Baa3 de Moody’s. La MCB détient une notation investment grade depuis plusieurs années.
Vous venez de boucler le rachat de Nouvelle Mici Embaci en Côte d’Ivoire ?
Effectivement, il s’agit d’une opération de LBO sophistiquée consistant en la reprise de l’activité Nouvelle Mici Embaci, qui était détenue par le groupe Carré d’Or en Côte d’Ivoire, par un consortium emmené par AFIG et Norfund. La MCB était l’arrangeur de la dette avec son partenaire local, Bridge Bank.
L’opération comportait une part en equity et une part en dette sur un horizon de temps adapté. Les montants investis couvrent le financement de l’acquisition et du fonds de commerce.
Il est plutôt rare de voir des LBO dans la région? Comment l’avez-vous structuré?
Oui, vous avez raison. Il s’agit de l’une des premières LBO en Afrique de l’Ouest. Nous avons au sein de MCB, une équipe assez outillée dans ce genre d’opérations. Concernant cette transaction, il fallait concilier la dette et le capital de sorte que la durée de la dette reflète l’horizon d’investissement des nouveaux actionnaires. L’autre caractéristique de l’opération était son plan de développement ancré sur le développement durable et intégrant nos objectifs en matière de respect de l’environnement.
Quel est votre positionnement dans le paysage bancaire africain ?
Nous accompagnons essentiellement les banques et les entreprises. Bien qu’étant la plus grande institution financière à Maurice, avec une présence traditionnelle à Madagascar, aux Seychelles et aux Maldives, nous avons opté pour faire du corporate banking dédié aux entreprises engagées dans des opérations transfrontalières et leurs phases de croissance en général. Nous n’opérons pas avec des licences bancaires locales, pays par pays, mais plutôt en appoint en apportant des devises (euros et dollars) en parfaite harmonie avec nos partenaires locaux, la Bridge Bank en l’occurrence dans le cas de cette dernière opération.
N’avez-vous pas l’intention de solliciter une licence bancaire en Afrique de l’Ouest ?
Notre modèle actuel nous satisfait pleinement. Nous sommes arrangeur et important bailleur en Afrique de l’Ouest et de l’Est avec des bureaux de représentation et une synergie avec les banques locales. Nous sommes entre autres actifs sur le segment du pétrole et du gaz ainsi que le segment des énergies renouvelables et apportons des solutions rapides sur mesures, tout en capitalisant sur nos divers bureaux dont ceux à Dubaï, Nairobi, Johannesburg et àParis.
Vous avez mentionné le Développement durable ? Faites-vous partie des institutions engagées à ne plus financer le fossile en Afrique pour forcer la transition ?
Au contraire, nous pensons que l’Afrique a besoin de valoriser ses ressources naturelles pour réussir une transition énergétique harmonieuse. Il ne suffit pas d’appuyer sur un bouton et de déclencher la transition. Notre objectif est d’accompagner notre continent à travers bien entendu un engagement de développement durable en contribuant à financer cette transition.
Vous figurez au 14e rang du classement Financial Afrik des 30 banques africaines par l’impact régional ? Peut mieux faire ?
Pour nous ce n’est pas une question de classement. Ce qui nous guide c’est de pouvoir accompagner nos clients. Notre modèle n’est pas de s’implanter dans tous les pays. C’est plutôt un modèle de niche et une ambition de générer le maximum d’impact dans notre spécialité. La philosophie de MCB c’est de travailler en complémentarité avec les banques locales. Le centre financier international de Maurice permet d’accompagner ce types de transactions. La place financière de Maurice n’a pas pour seul avantage comparatif la fiscalité mais surtout un écosystème, comprenant des fonds d’investissements et des prestataires de services de qualité, favorisant l’investissement durable en Afrique.