Aujourd’hui, la Human Rights Foundation (HRF) a le plaisir d’annoncer les trois lauréats du Prix international Václav Havel 2020 pour la dissidence créative.
Les lauréats du prix Havel 2020 sont l’artiste graphique chinois Badiucao, le satiriste politique saoudien Omar Abdulaziz, et le défunt musicien de gospel rwandais et militant pour la paix et la réconciliation Kizito Mihigo, qui est le premier lauréat à titre posthume depuis la création du prix en 2012. Les lauréats de cette année recevront leur prix à 16h45 GMT le vendredi 25 septembre, lors d’une cérémonie virtuelle à la douzième édition du festival Oslo Freedom Forum, qui se déroule exceptionnellement en ligne cette année, Covid-19 oblige.
Kizito Mihigo était un chanteur de gospel catholique rwandais, auteur de chansons, organiste et fondateur de la Fondation Kizito Mihigo pour la paix, qui œuvrait pour la paix, la réconciliation et la non-violence dans les écoles et les prisons par le biais de concerts, de pièces de théâtre et des poèmes. D’origine tutsie, il a fait preuve d’un courage extraordinaire dans une chanson de 2014 dans laquelle il a appelé à la compassion pour toutes les victimes de violences, y compris les civils tués par les forces du Front patriotique rwandais de Paul Kagame, dominé par les Tutsis, après le génocide de 1994 au Rwanda. La chanson représentait une critique d’un programme gouvernemental qui oblige les enfants Hutus à s’excuser pour les crimes de leur parents, meme si les enfants n’etaient pas en vie durant le genocide. Le régime a rapidement interdit la chanson car elle contredisait son récit officiel, qui présente les Tutsis comme les seules victimes de la tragédie rwandaise. Mihigo a sorti la chanson en sachant parfaitement qu’elle entraînerait de terribles conséquences. « Le message est parfois plus important que le messager », a-t-il déclaré. Il fut détenu avant d’être présenté comme co-conspirateur d’un complot pour renverser le gouvernement. Il a déclaré avoir été contraint de plaider coupable aux accusations sous peine de menaces d’emprisonnement à vie ou de mort en prison. Il fut condamné à 10 ans de prison avant d’être libéré sur grâce présidentielle après avoir purgé trois ans. Interdit de sortir du territoire et de continuer les activités de sa fondation, il a tenté de fuir le pays en début 2020. Mais il a été arrêté par la police qui a annoncé sa mort dans sa cellule en février 2020. Le régime a affirmé qu’il s’agissait d’un suicide, mais Mihigo avait confié à ses amis quelques semaines avant sa mort qu’il subissait des pressions et du harcèlement de la part du régime pour qu’il fasse de faux témoignages contre les opposants politiques.
Badiucao est un artiste dissident chinois exilé basé en Australie. Ses dessins ont révélé les mensonges du régime chinois, notamment la censure du Parti communiste chinois sur la pandémie de coronavirus. Badiucao est le créateur du « drapeau Lennon », qui est devenu un puissant symbole de protestation et qui a inspiré et mobilisé la communauté mondiale pour qu’elle soit solidaire du mouvement pro-démocratique de Hong Kong. Le régime chinois a tenté de faire taire Badiucao en intimidant sa famille en Chine.
Omar Abdulaziz est un satiriste et activiste politique saoudien en exil au Canada. Son émission d’information satirique sur YouTube tourne en dérision les mensonges du régime saoudien et sensibilise l’opinion internationale sur la répression et les violations des droits de l’homme en cours dans le royaume, où la liberté d’expression est inexistante et où la satire politique est un crime. Le régime saoudien a tenté de faire taire son militantisme en intimidant sa famille, en lui offrant des pots-de-vin et en faisant de lui une cible de surveillance.
Le prix Havel, qui porte le nom du poète, dramaturge, dissident, homme d’État tchèque et ancien président du HRF, Václav Havel, récompense les personnes qui font preuve de courage, de créativité et d’innovation artistique en s’opposant à des dictatures.
Havel a mené la révolution non violente qui a libéré la Tchécoslovaquie du régime communiste, en utilisant d’abord sa poésie et ses pièces de théâtre, et plus tard, ses essais politiques et le manifeste de la Charte 77, pour contester le pouvoir arbitraire et l’injustice dans son pays. La HRF a lancé le prix Havel en 2012 avec le soutien de Dagmar Havlová, la veuve de Havel.
Les lauréats du prix Havel reçoivent une sculpture en bronze représentant la « Déesse de la démocratie », la figure emblématique érigée par les étudiants chinois lors des manifestations de la place Tiananmen en juin 1989. Chaque sculpture incarne l’esprit de la dissidence créative et représente le pouvoir de la vérité et de la beauté face à la brutalité et à l’oppression. Les lauréats se partagent également un prix de 350 000 couronnes norvégiennes (38 000 dollars).
Parmi les précédents lauréats figurent la militante saoudienne des droits des femmes Manal al-Sharif, l’artiste chinoise Ai Weiwei, le militant et musicien sud-soudanais Emmanuel Jal, le Théâtre libre de Biélorussie, le militant nord-coréen Park Sang-hak, le groupe thaïlandais Rap Against Dictatorship et le groupe de femmes, mères et sœurs de dissidents cubains emprisonnés connu sous le nom de Dames en Blanc.
La Human Rights Foundation est une organisation non partisane et à but non lucratif qui promeut et protège les droits humains dans le monde entier, en se concentrant exclusivement sur les sociétés fermées. Le président de la fondation est Garry Kasparov. Pour toute demande d’entretien, veuillez contacter media@hrf.org