« Photopgraphier c’est saisir le réel, ce n’est pas l’inventer »
Par Maria Nadolu
Cette année, elle célèbre 10 ans depuis la parution de sa première photo «Fashion Week». On connaît Andreea en tant que «photographe de front row et backstage» ; elle couvre de New York à Paris et Milan et ses photos ont été publiées par les classiques, Vogue Paris, Elle UK, Harper’s Bazar UK. Mais, en effet, elle est une conteuse en images, qui aime sortir des catégories fixistes. A la recherche de l’authenticité, à travers ses lentilles, elle surprend l’humain dans sa transformation perpétuelle, avec sa beauté et ses ombres, en relevant de surprenantes histoires en image. Autour d’un café oriental, avec la brise d’un printemps un peu fou, elle partage ses idées, en images et en mots avec Financial Afrik.
Comment as-tu découvert la photo? Et pourquoi la photo ?
Pour moi, c’est être à l’aise, c’est la plus simple chose au monde. C’est venu naturellement, plus naturellement que se brosser les dents ; je le fais par instinct ; je ne dois même pas réfléchir quand je photographie ; et c’est un véritable plaisir. J’aime la photo depuis mon enfance. je trouve ça rigolo.
Tu es active dans le champ du glamour absolu.. …Qu est que c’est, le glamour aujourd’hui…?
Excellent ! Mais c’est quoi le glamour aujourd’hui ? Comment tu le perçois, toi, d’aussi prêt ? Le glamour, c’est la liberté. Le glamour, c’est être toi-même, avoir le temps, et être amoureux de toi-même. Une femme glamour est une femme qui est bien dans sa peau ; qui est elle-même. C’est l’archétype de Sophia Lauren, qui était glamour tout en étant elle-même. Si on le définit par rapport à une paire de chaussures, une robe, c’est volatile.
A–t-il été facile d’intégrer ta perspective dans le monde de la mode ?
Oui, cela fut. Il y a plein de talents avec différents styles. J’ai eu la chance que mon style fût à la demande à cette époque. Tout le monde me demandait. Quel est le secret de ma réussite, mais en même temps, c’est la chance, comme dans une amitié, de partager les même valeurs. Ce que je offrais c’était juste ce que les revues cherchaient. Bien sûr, c’était au juste moment, car le timingest aussi important ; mais en quelque sorte, la synchronisation c’est un autre mise, peut être divine, cosmique.
Pourrais-tu définir ton style ?
Mon style c’est le naturel. Il me semble que c’est le reportage avec le minimum d’interventions sur le scénario de la photo. Le sentiment derrière le glamour.
Quel est le scénario derrière une photo qui t’as surpris ?
….Qui m’a surpris ou qui m’a plue?
Eh ben, l’un ou les deux à la fois. La surprise va bien avec le plaisir, non?
Ou pas, elle peut créer de l’impact sans plaisir. Mais en effet, la grande majorité me surprend, car j’attends le moment, ce moment, où se passe le surprenant. La majorité des photos ont un double sens ; on voit une scène, mais il y a un arrière plan où se passe autre chose. Et on arrive à se dire : ah bon, ce n’était pas ce que j’imaginais au début…
Donc, t’es un peu à la chasse ?
Ah oui, si on ne serait pas à la chasse, on dormirait. Qu’est-ce qu’on a à manger si on ne chasse pas ? C’est pour cela que la chasse a été inventée…on part à la découverte…
Entre Milan, New York, Paris, comment vois-tu la dynamique de l’univers de la mode?
Il s’est changé, comme le reste du monde; on est tous organiquement liés. On voit dans la mode, ce qui arrive dans un certain pays, ou région ; le contexte social et politique s’entrevoit dans la dynamique de l’industrie. Dans notre industrie, le challenge semble s’inscrire par rapport au digital, à cette nouvelle exposition, aux « influencers », à la nouvelle manière de t’exprimer. Par rapport au média, je ne vois pas le besoin d’un conflit entre le digital et le print ; ils peuvent très bien aller main dans la main. Ils servent de supports à deux formes d’expressions qui peuvent se différentier. On peut donner plus de valeur au print – avec un haut contenu au niveau éditorial et visuel. Et le net se consacre par rapport à sa valeur ajoutée – la vitesse ; en revenant à la mode, elle s’est soumise au phénomène.
A mon avis,il y a trop de buzz sur internet ; ce n’est pas autant le fait d’être influencé par le facebook, l’instagram etc.; mais le fait qu’on perd du temps ; le temps de notre vie, en regardant, pas mal de fois, la vie des autres.
Y a-t-il une course du consumérisme en haute couture ?
Il y a eu un moment où les gens se (re) présentaient par leurs vêtements ; c’était le pouvoir de la marque, «comment et avec quoi je m’habille me définit» ; et on gagnait bien dans la mode. Maintenant je sens que le focus a changé en quelque sorte, il y a d’autres domaines d’intérêt, on s’exprime également par nos expériences aujourd’hui : les voyages, une sortie au resto, monter l’Everest, l’éducation continue etc. et la mode perd en quelque sorte ; et il y a en a beaucoup qui ne sont pas habitués à l’idée de perdre. Et donc, ils accélèrent le rythme, ils sortent collections après collections. En regardant la course aux nouveautés dans laquelle pas mal des marques s’engagent, on sent que quelque chose change. Personnellement, je reste d’opinion peu, mais mieux.
Dans le portrait, est-ce que tu t’approches trop de l’esprit de tes modèles?
Non, pas du tout. C’est un processus très intime et subjectif, un portrait. Cela dépend, à quel point on se laisse, on est sincère avec nous-même et le photographe. Moi, j’ai des émotions et des angoisses toutes les fois ; il se traite de l’esprit d’une personne… il y a un effort et une préparation à la veille. Mais au moment où la séance commence, toute cette timidité se dissipe, bizarre… et il y a un flux, ça arrive naturellement.
La vie, versus la pose ?
On pense beaucoup à comment faire la photo ; comment poser etc. Il y a même des matériaux en ligne qui t’expliquent comment tenir ta main pour envoyer un tel message ; émaner un certain sentiment par un geste qu’on arbore; mais ce que le récepteur détecte à première vue est si le sujet se sent à l’aise ou pas ; la confiance en soi même ; fondamentalement, ce qu’un portrait dégage c’est l’authenticité ou bien son manque ; elle ne peut pas être artificiellement créée en abordant un geste ou un autre ; on doit penser moins quand on est photographié.
Noir et blanc, versus couleur ?
Le deux. Mais qu’il le soit, réellement. J’aime les photos avec le blitz et le contraste. C’est vrai, en noir et blanc, on lit plus facilement l’histoire ; en couleur, l’œil peut être distrait par plusieurs choses.
Des moments mémorables de tes voyages ?
Il y a avait un temps quand les défilés de mode étaient comme un théâtre. C’était 15- 20 minutes d’intensité, un vrai spectacle ; maintenant tout se passe plus vite, c’est plus commercial. Je me rappelle celles d’Alexander McQueen, Marc Jacobs à Vuitton, les défilées Chanel, les défilées Prada.
Une émotion de voyageur à partager avec nos lecteurs ?
Soyez présents quand vous voyagez! Le voyage commence au moment où vous sortez de chez vous. En vie, comme en voyage, c’est souhaitable d’être présent, d’être avec les yeux ouverts, de ne pas être distrait. Ne soyez pas attachés à vos portables. Regardez autour.