La tragique journée du 7 décembre à Cotonou nous ramène à une vérité ancienne que Robespierre prononça face à l’échafaud : la vertu sans la force est impuissante. Il en va de même de la démocratie. Belle dans son principe, fragile dans sa pratique, totalement vulnérable lorsqu’elle n’est pas adossée à une puissance capable de la défendre. Au Bénin, pour contenir cette tentative de putsch, il a fallu compter sur la réaction des troupes loyalistes — et, fait notable, sur le soutien immédiat de l’armée nigériane.
Plus que jamais, la CEDEAO doit accélérer la mise en opération de sa Force en attente, et se doter d’une doctrine claire d’intervention. La jurisprudence Yaya Jammeh, en 2017, avait montré que la volonté populaire pouvait être protégée par la force légitime lorsqu’un dirigeant tente de confisquer le verdict des urnes. Le coup d’État avorté de Cotonou survient, ironie du calendrier, au moment même où l’organisation régionale se penche sur le cas embarrassant de la Guinée-Bissau, autre exemple de fragilité institutionnelle chronique.
Dans tous ces scénarios où les institutions démocratiques vacillent ou sont purement confisquées, la réponse supranationale n’est pas une option : elle devient une nécessité. Si la CEDEAO veut réellement défendre la démocratie, elle doit accepter l’évidence — l’usage calibré de la force, y compris militaire, pour protéger la légitimité constitutionnelle contre les humeurs de mutins.
Le cas béninois ajoute à l’absurde une nuance de burlesque. Nous ne sommes ni face à un pouvoir finissant, ni devant un régime en décomposition. Le Bénin est engagé dans un cycle de réformes et de développement salué par les institutions internationales, validé par des résultats probants. À la veille d’une alternance démocratique majeure, le pays affiche la deuxième meilleure notation de l’UEMOA et la meilleure perception de risque auprès des investisseurs, comme en témoignent les primes souveraines. Rien, absolument rien, ne justifie un coup d’État.
Consciente de l’enjeu, la CEDEAO a annoncé avoir « ordonné le déploiement immédiat » de troupes venues du Nigeria, de Sierra Leone, de Côte d’Ivoire et du Ghana pour appuyer « le gouvernement et l’armée républicaine du Bénin » et « préserver l’ordre constitutionnel ».
La démocratie a un prix : celui d’être protégée. L’Afrique de l’Ouest doit cesser de l’oublie.

