« Pour un titre non admis au guichet de refinancement de la BCEAO et un taux de 6,50%, en dessous des rendements des Etats les mieux notées de la zone sur une duration équivalente, la célérité du placement est une prouesse » …
En juillet dernier, l’émission de l’emprunt obligataire vert et durable (« GSS Bond » ou « Green, Social and Sustainability Bond ») par Appel Public à l’Epargne , d’un montant de 70 milliards FCFA sur 7 ans avec un coupon de 6,5%, avait été accueillie avec enthousiasme par le marché financier de l’UEMOA. L’opération avait été clôturée par anticipation en moins de quatre jours ouvrés, reflétant à la fois la qualité de la signature de l’émetteur et l’ingénierie financière des arrangeurs, en l’occurrence Impaxis, arrangeur principal et chef de file et, d’autre part, Coris Bourse et EDC Investment Corporation, respectivement Co-Arrangeur et Co-Chef de file. Administrateur; Directeur Général de la SGI IMPAXIS, Abacar S. Diaw revient sur les raisons du succès de la première GSS Bond en zone UEMOA. « Pour un titre non admis au guichet de refinancement de la BCEAO et un taux de 6,50% en dessous des rendements des Etats les mieux notées de la zone sur une duration équivalente, la célérité du placement est une prouesse », déclare-t-il.
Le 15 juillet dernier, Impaxis Securities a lancé la dernière phase du programme de la BIDC d’un montant de 70 milliards FCFA, dénommé ‘’GSS Bond BIDC-EBID 6,50% 2024-2031’’. Pouvez-vous dresser le bilan de cette opération ?
Comme vous le soulignez, cet emprunt a été lancé le 15 juillet 2024 sur le marché financier régional pour un montant de 70 milliards de FCFA sur une maturité de 7 ans avec 2 ans de différé sur le capital pour un taux de 6,50%. Cet emprunt a la particularité d’être le premier GSS Bond en Appel Public à l’Epargne sur le Marché Financier Régional. Les investisseurs ont répondu favorablement et rapidement avec un placement clôturé par anticipation au bout de la première semaine dès le vendredi 19 juillet 2024. Il faut souligner que dans le contexte de liquidité de la zone, pour un titre non admis au guichet de refinancement de la BCEAO et un taux de 6,50% en dessous des rendements des Etats les mieux notées de la zone sur une duration équivalente, la célérité du placement est une prouesse. Nous avons eu le soutien des investisseurs de la zone UEMOA et hors zone qui ont vu dans ce papier un titre intéressant et participant à l’atteinte des Objectifs du Développement Durable (ODD). Cela témoigne à nouveau la qualité de la signature de la BIDC qui est entrain d’accomplir, sous le leadership du Président Donkor, un travail formidable dans la région.
Cette opération a été présentée comme le premier ‘’GSS bond’’ émis par appel public à l’épargne sur le marché financier régional. Comment les investisseurs ont-ils réagi à cette particularité, comparé aux deux tranches précédentes ? Quelles sont les particularités d’une émission GSS pour les néophytes ?
Par GSS, on entend « Green Social and Sustainable », donc on parle d’emprunt permettant de financer des projets respectueux de l’environnement, durables et ayant un impact. Les investisseurs institutionnels, notamment internationaux, sont de plus en plus sensibles à ces critères et utilisent des filtres liés à ces critères pour valider les choix d’investissement. Les investisseurs ont réagi positivement et salué ce premier emprunt GSS par APE sur le marché. La BIDC en tant qu’émetteur a déjà mis en place un cadre pour capter des fonds dans la zone et hors zone.
L’Autorité des Marchés Financiers (AMF-UMOA) a mis en place une taxonomie pour mettre en place un cadre. Les émissions de GSS Bonds font appel à des évaluateurs externes qui vont vérifier que les projets qui seront financés par la BIDC sont éligibles dans le cadre d’une « Second Party Opinion » (SPO). Cette étape se fait en amont de l’émission. Les émetteurs devront aussi, post-émission, en aval, mettre à disposition des investisseurs un rapport sur l’utilisation des fonds et leur impact permettant d’éviter tout détournement d’objectifs.
Dans le contexte de liquidité de la zone, la menace de sortie des Etats AES de la CEDEAO et en l’absence de refinancement des titres de la BIDC, comment avez-vous fait de cette opération un succès retentissant sur le marché financier et un placement éclair ?
Nous rendons grâce à Dieu et remercions les investisseurs pour leur réponse prompte et massive qui a permis de clôturer l’opération en moins de quatre jours ouvrés ! Nous avons eu à travailler avec un client qui est une référence en tant que DFI régional avec une signature financière en constante amélioration. En sus de cela, l’équipe projet de la BIDC n’a ménagé aucun effort et a fait montre d’une disponibilité exceptionnelle durant la phase de structuration tout comme celle du roadshow investisseurs.
Pour finir, le succès est aussi la résultante d’un travail minutieux accompli par les équipes d’IMPAXIS, Arrangeur Principal et Chef de file de l’opération, qui maintiennent un dialogue permanent et régulier avec les investisseurs et toutes les parties prenantes pour toujours structurer une opération adaptée aux réalités du marché et au mieux des intérêts du Client, l’émetteur. Il faut également souligner l’appui de haute facture des membres du Consortium, Ecobank et Coris Bourse, ainsi que nos confrères SGIs composant le syndicat de placement.
Il faut également noter que l’émetteur, la BIDC, malgré le contexte que vous évoquez est un supranational qui le met en termes de risque à un niveau similaire que les souverains. Cette émission est la huitième (8ème) émission de la BIDC sur le Marché Financier Régional et l’émetteur a toujours réglé ses échéances en temps et en heure sans retard ni délai même pendant la période de la Covid-19 où elle avait accordé des reports d’échéances sur certains financements.
L’avantage d’un titre comme la BIDC réside aussi dans la défiscalisation du titre dans toute la zone CEDEAO malgré l’absence de refinancement qui peut être un handicap pour les banques de la zone. L’emprunt de la BIDC était aussi la première émission « verte, sociale et durable » à date d’un émetteur non souverain sur le marché financier régional. Les investisseurs sont demandeurs des émetteurs comme BIDC et encore plus avec l’aspect GSS.
Après votre opération, on a vu arriver d’autres émissions GSS et d’autres sont en gestation. Quelle lecture faites-vous du marché et l’engouement naissant pour les GSS ? Est-ce un aspect différentiant permettant d’attirer plus d’investisseurs internationaux ?
Notre zone a pris du retard sur le sujet du GSS contrairement à d’autres places financières. Donc on se réjouit qu’après l’émission de la BIDC qui joue un rôle primordial dans le développement de la zone que d’autres émetteurs suivent le pas. D’autres projets sont dans les cartons et cet engouement naissant pour les GSS devrait permettre de placer la durabilité au cœur de la stratégie des investisseurs. Sur le point des investisseurs internationaux, il sera de plus en plus difficile de les faire venir sur des investissements dans la zone ne respectant pas les critères ESG. A nous les acteurs de prendre en compte ses critères dans nos structurations dans la mesure du possible pour les attirer sur notre marché financier régional.
Le programme de levée de fonds des 400 millions de USD (c. 240 milliards FCFA) enclenché par la BIDC en pleine période Covid-19 s’achève avec le GSS Bond émis en juillet dernier. Quel a été l’impact de ce programme pour la région ? Quel serait la suite ?
Vous faites bien de revenir sur le programme qui se clôture à travers cette émission. Après une première tranche lancée en mai 2021 qui a marqué les annales par la célérité de placement (opération clôturée en moins de 4h) avec une sursouscription record de 2,3 x le montant recherché, la tranche 2 de 120 milliards était à l’époque la plus grosse levée de fonds pour un émetteur non souverain sur le MFR, on a clôturé avec succès la troisième et dernière tranche par le premier GSS en APE dans la zone.
Un tel programme, en levant 240 milliards de F CFA, est un exemple sur le marché financier régional. Le programme a été un succès et a joué un rôle clef dans la relance post-covid. Tous les pays de la zone UEMOA ont bénéficié de cette levée de fonds dans des secteurs clefs tels que les énergies, la souveraineté alimentaire, l’agriculture, la santé… Ce programme a également eu un effet catalyseur permettant à la banque de développement de lever et d’attirer d’autres ressources dans la région. La BIDC, en tant qu’institution du développement, va continuer à avoir un impact en finançant des projets stratégiques dans la zone UMOA et, pour des questions de gestion actif-passif, aura des besoins de financement en XOF pour financer les projets en question.
Au-delà de la BIDC, toutes les institutions régionales devraient être dans une logique de programme qui donne de la visibilité aux investisseurs, avec un processus plus fluide avec le régulateur permettant de raccourcir les temps d’instruction et d’avoir des opérations qui se dénouent plus rapidement participant ainsi au développement du marché et à son efficience.
IMPAXIS se distingue encore une fois sur une opération non souveraine ? Quelle est la recette du succès d’Impaxis sur ce segment ?
Impaxis a comme objectif d’être l’acteur de référence des émissions non souveraines sur le Marché Financier Régional et se donne les moyens d’atteindre cet objectif. Dans cette optique, nous tenons compte des contraintes de l’émetteur dans la structuration tout en adressant les besoins de l’univers des investisseurs pour chaque opération. Le point fort d’IMPAXIS est la qualité des équipes qui lui permet de se distinguer par sa technicité, son agilité et son professionnalisme. Je rappelle que le programme de la BIDC avait fait l’objet d’un appel d’offres. Je tiens donc à saluer et à rendre un hommage appuyé à l’ensemble des équipes Impaxis qui travaillent sans relâche, avec ingéniosité et pragmatisme, pour que tout mandat signé s’exécute avec succès et avec une satisfaction du client, cette dernière étant la meilleure publicité et la plus grande fierté pour un acteur comme nous.
Votre dernier mot à l’attention de nos lecteurs ?
Je ne peux conclure mes propos sans remercier les investisseurs qui nous font confiance sur chacune de nos opérations ; remercier la BIDC pour sa confiance en nous confiant ce programme dont l’exécution lui a donné entière satisfaction, nos confrères du consortium avec qui on a conduit l’opération, EIC et Coris Bourse. Nous donnons rendez-vous aux investisseurs pour d’autres opérations à venir prochainement avec toujours cette touche d’innovation au profit des investisseurs. L’innovation est importante mais il faut répondre à un besoin.