La récente allocution du président français Emmanuel Macron à propos d’une « annulation massive des dettes africaines » a redonné de l’espoir à la Tunisie. Ainsi, entre autres mouvements de la société civile, l’Observatoire tunisien de l’économie s’est joint à 100 organisations dans le monde qui demandent l’annulation de la dette « des pays en développement ».
Libéré de la dictature de Ben Ali en 2011, au terme d’une insurrection populaire, le pays des jasmins reste prisonnier d’une fonction publique budgétivore (800 000 fonctionnaires émergeant sur 46 % du Budget de l’Etat) ainsi que d’une dette abyssale estimée à 80% du PIB contre 40% en 2010. Une dette aux mains du FMI, de la Banque Mondiale, d’opérateurs privés internationaux, dont des européens, américains ou encore des nippons par le biais des Samouraï Bonds, qui sonne comme un contre-coup au rêve social tunisien.
Exclue des mesures d’annulation de la Banque Mondiale et du FMI car « trop riche », le champion africain des huiles d’olives vit une sorte de trauma avec cette dette extérieure rampante dont le défaut, en 1881, lui valut de tomber dans le protectorat français. Aux lendemains du printemps arabe, le président Moncef Marzouki avait refusé de signer un accord passé avec le FMI exigeant au préalable un audit pour séparer le passif de l’Etat de celui de l’ancien régime. Mal lui en a pris. L’incident a été vite oublié remplacé par les négociations sur les échelonnements et autres effacement conditionnels.
Pour sa part, l’Union Européenne avait, en 2012, avait fait pousser une fleur de printemps arabe, en déclarant « odieuse » la dette publique extérieure des pays d’Afrique du Nord et du Proche-Orient. Une prise de position morale aujourd’hui dépassée.
L’annulation de la dette pour la Tunisie permettrait de libérer 6,6 milliards de dinars tunisiens (2,35 milliards de dollars), soit 2,8 fois le budget annuel du ministère de la Santé pour 2020 (2,5 milliards de dinars), estime l’Observatoire tunisien de l’économie. Avec une récession prévue de -4% du PIB (FMI), la Tunisie aura besoin d’un tel bord d’oxygène pour relancer ses programmes de développement.