De notre envoyé spécial à Marrakech, Dia El Hadj Ibrahima
La sixième édition de la conférence internationale Atlantic Dialogues se déroule du 13 au 15 décembre à Marrakech, sous le haut patronnage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI du Maroc.
Devenu un rendez-vous annuel incontournable pour échanger sur des questions essentielles, l’Atlantic Dialogues réunit de grandes figures autour des enjeux stratégiques régionaux et mondiaux dans le cadre somptueux de la Mamounia. Dominique Strauss Khan a planté le décors en présentant les perspectives 2018 d’un monde de plus en plus globalisé où les fluctuations du pétrole, du marché et de la société s’entre-mêlent.
« »Certains pays africains peuvent profiter de la croissance mondiale, mais pas tous, en raison d’un modèle économique qui repose essentiellement sur les exportations de matières premières, avertit Dominique Strauss-Kahn – ancien directeur général du FMI.
Le clou de l’événement aura été le lancement de la quatrième édition du rapport annuel Atlantic Currents de l’OCP Policy, un document de 176 pages qui reprend l’essentiel des préoccupations actuelles du continent, de la migration à la résilience des économies. « 70% des migrants africains restent en Afrique. Ces migrants, quel que soit leur nombre, ne représentent que 13% des migrants de par le monde. De plus, ils ne transfèrent à leur pays d’origine que 15% de leurs gains financiers », indiquent les auteurs du rapport.
Organisée par le think tank OCP Policy Center, basé à Rabat, cette rencontre de haut niveau abordera les grands enjeux géopolitiques et économiques du bassin Atlantique Sud. Elle distinguera 50 jeunes leaders émergents et verra intervenir plus de 340 participants issus de 90 nationalités différentes. Son thème cette année : « L’Afrique dans l’Atlantique, le temps de l’action ».
Se saisir du discours sur l’Afrique
Aborder sans complexes les défis présents, dessiner d’autres perspectives et surtout, se donner les moyens de penser et d’agir à une échelle intercontinentale… Telles sont les ambitions de la conférence de haut niveau Atlantic Dialogues.
Ce forum annuel lancé en 2012 vise à désenclaver le débat international sur les enjeux atlantiques, en faisant mieux porter les voix et les points de vue du Sud. L’intitulé de la
première séance, « L’Afrique détient son propre récit », va au-delà du constat ou du manifeste. C’est une base d’engagement ferme et une force de proposition, dans le droit fil de l’action, des nombreuses publications et de la raison d’être même de l’OCP Policy Center.
Aussi peu présent soit-il dans les perceptions dominantes, en raison des aires linguistiques héritées de la colonisation et de l’organisation géopolitique issue du XXe siècle, l’Atlantique Sud n’en représente pas moins une réalité complexe. L’OCP Policy Center en est convaincu: c’est un point d’appui crucial pour l’avenir de l’Afrique.
Ce vaste continent, loin d’être isolé du reste du monde, se doit de mettre en valeur sa longue histoire d’échanges avec l’Europe et les Amériques, pour son propre intérêt.
Converser sur un pied d’égalité
Afin d’assurer une conversation équilibrée entre le Nord et le Sud, responsables politiques, hauts fonctionnaires, chercheurs et décideurs économiques viendront de tout le littoral africain – de l’Afrique du Sud au Maroc en passant par le Nigeria – mais aussi des Amériques et d’Europe.
Sur 340 participants cette année, 30% viendront d’Afrique subsaharienne, 21% d’Europe, 19% du Maroc, 18% d’Amérique du Nord et 9% d’Amérique latine. Les représentants d’institutions internationales compteront pour 21% d’entre eux, le secteur privé 15%, les think tanks 23%, le monde académique 14% et les médias 7%.
Dans un cadre de débats en anglais qui encourage les discussions informelles, pourront ainsi échanger des personnalités aussi diverses que Barre Seguin, directeur de la stratégie pour l’U.S. Africa Command, Mary Beth Leonard, ambassadrice des Etats-Unis auprès de l’Union africaine ou Fathallah Sijilmassi, secrétaire de l’Union pour la Méditerrannée (UpM).
Aborder les vraies questions
Parmi les responsables politiques attendus figurent Edward Scicluna, ministre des Finances de Malte et Omar Amadu Jallow, ministre gambien de l’Agriculture. Trois anciens présidents latino-américains tireront pour l’Afrique les leçons des trajectoires de développement de leurs pays respectifs : Eduardo Duhalde (Argentine), Jorge Quiroga (Bolivie) et Michel Rodriguez (Costa-Rica).
Les anciens Premier ministres Aminata Touré (Sénégal) et Lionel Zinsou (Bénin) seront présents, de même que les anciens ministres des Affaires étrangères Hubert Védrine (France), Miguel Angel Moratinos (Espagne) et Paulo Portas (Portugal), ainsi que l’ancien
ministre de l’Education Silas Lwakabamba (Rwanda).
Le rapport annuel Atlantic Currents, sera présenté lors de la première journée de la conférence. Dix séances plénières seront articulées autour de l’économie le 13 décembre, l’éducation,puis la géopolitique et le financement des infrastructures le 14 décembre, avant la sécurité, les interventions militaires et les leçons à tirer des expériences de développement d’Amérique latine le 15 décembre. Elles se déclineront en sessions axées sur des thèmes précis : migrations, chaînes de valeur globales, intégration africaine et mix énergétique notamment.
Faire de la place aux jeunes
Les discussions se poursuivront en soirée autour de questions tout aussi centrales : inégalités sociales et de genre, consolidation de la démocratie, efficacité de l’aide au développement, nouveaux horizons asiatiques, rôle des diasporas, nouveau « récit » sur
l’Afrique, perspectives du « Trumpisme », crimes transnationaux et violence extrêmiste, entre autres.
Une nouvelle cohorte de 50 jeunes âgés de 23 à 35 ans, sélectionnés sur dossier, rejoindront le réseau des Atlantic Dialogues Emerging Leaders (ADEL), fort de 250 personnes. Ces professionnels de 25 nationalités différentes (27 Africains, 7 Latino-Américains, 7 Européens, 7 Nord-Américain et 1 Asiatique) suivront du 10 au 12 décembre deux jours d’ateliers et de débats spécialement conçus pour eux, en présence de 20 anciens du réseau ADEL.
Issus du monde académique, des think tanks, de la société civile, du secteur privé et des organisations internationales, ils participeront aux Atlantic Dialogues de façon inédite, en soumettant des projets concrets axés sur le changement et le développement.