L’Union syndicale des Travailleurs de Guinée (USTG) est empêtrée depuis quelques jours dans une profonde crise de leadership. Depuis que le trublion Aboubacar Soumah a décidé de suspendre la participation du syndicat des enseignants (SLECG) au sein de la centrale syndicale faitière, l’USTG s’en sort fragilisée. Accusé de trahison et de manœuvres visant à déstabiliser le mouvement syndical par Aboubacar Soumah, par ailleurs numéro deux de l’USTG, le premier secrétaire Général de la centrale syndical, Abdoulaye Sow, se retrouve isolé et grandement affaibli. La défection de celui qui est perçu aujourd’hui par bon nombre d’observateurs comme incarnant le renouveau du mouvement syndical guinéen, est un véritable coup pour l’USTG.
Le départ du SLECG de l’influent Aboubacar Soumah a entrainé avec lui la Fédération syndicale Autonome des Télécommunications (FESATEL). Celle-ci accuse pour sa part Abdoulaye Sow de vouloir prendre en otage l’USTG, avec l’aide, selon elle, d’un groupuscule de la FESABAG, la «puissante» fédération syndicales des banques, dont il est le secrétaire général. La FESATEL dénonce également un manque de transparence dans la gestion de la centrale. L’histoire avait pourtant bien commencé entre ces deux têtes d’affiche du mouvement syndical, longtemps restés dans l’ombre des ténors de la vielle garde qu’ils ont fini par supplanter et imposer leur leadership naturel au moment où la lutte syndicale bat de l’aile en Guinée.
La passation de service à la tête de l’USTG, intervenue il y a près de deux ans, entre le vétéran louis M’Bemba Soumah et Abdoulaye Sow avec à ses côtés Aboubacar Soumah du SLECG, avait des allures d’un passage générationnel. Ce changement de leadership avait un tant soit peu redonné de l’espoir au syndicalisme guinéen. Ironie du sort, le renversement de la vielle classe et la prise du leadership par la nouvelle génération intervenait aussi dans un contexte de crise. Aboubacar Soumah du SLECG, auréolé de ses victoires successives face au gouvernement d’Alpha Condé pendant la grève des enseignants et Abdoulaye Sow, de la FESABAG s’étaient tous « désaffiliés » de l’USTG afin de mettre pression sur Louis M’Bemba, accusé de nonchalance dans la défense des droits des travailleurs. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, l’USTG qui renoue avec ses vieux démons ne semble pas avoir tiré les leçons de son passé lointain ou récent.
C’est un retour à la case départ qui sonne le glas de l’apparente cohésion affichée par le tandem Sow- Soumah depuis leur intronisation à la tête de la centrale. De toute évidence, la mayonnaise n’a pas pris. D’un côté, un Abdoulaye Sow qui a longtemps « marché » avec la vieille garde syndicale et qui aujourd’hui est accusé de jouer un double jeu en faveur du gouvernement contre les intérêts des travailleurs. De l’autre, Aboubacar Soumah, qui représente l’aile dure et intransigeante du syndicalisme guinéen. Qui jouit de ce fait, d’une influence et d’une aura certaine au sein de la classe ouvrière, poursuit son ascension au sommet. Comme une sensation de déjà-vu.