L’UE obtient au rabais la Clause de la nation la plus favorisée
Les négociateurs de la CEDEAO et de l’UEMOA sont parvenus , vendredi 7 février, à un accord à minima avec l’Union Européenne. Aux allures d’un armistice sur nombre de points, l’accord porte sur une ouverture de 75% (et non plus 67% comme défendu jussue-là par les africains et 80% par les européens) du marché de l’Afrique de l’Ouest pendant 20 ans.
Le processus perdure depuis douze ans. Les accords sur les APE (Accords de partenariats économiques) ouvrent le marché de la région (80 millions pour l’UEMOA et 300 millions pour la CEDEAO) aux industries et services de l’UE.
En retour, l’Europe accepte les produits et les services provenant de la CEDEAO sous réserve de l’observance des normes qualités. De même, il est convenu d’une contribution financière de l’UE (6,5 milliards d’euros entre 2015 et 2019 et non 15 milliards d’euros longtemps réclamés par les ouest-africains) pour la mise à niveau des entreprises ouest-africaines.
L’accord est déséquilibré à notre avis par le faible engagement pris par l’UE à ne pas exporter de produits subventionnés vers l’Afrique de l’Ouest et la condition posée des normes de qualité (une barrière non tarifaire difficile à contourner). La rigidité des normes européennes disqualifie d’emblée toute semi transformation et transformation en Afrique.
Par exemple, le jus de mangue produit au Sénégal aura peu de chances de figurer dans les rayons des supermarchés européens. Ce qui ne sera pas le cas de la mangue non transformée, de l’arachide, de l’or ou du fer. Au final, sous les oripeaux du modernisme, l’on a reconduit le vieux principe de l’Afrique, fournisseur de matières premières. Cerise sur le gâteau, l’UE obtient la clause de la Nation la plus favorisée (NPF), ce qui, analysé dans toutes ses implications, représente un cadenas sur l’Afrique de l’Ouest contre les pays émergents. (voir article 16 relatif ci-dessous)
L’on notera que tout au long du processus de négociation, l’Afrique, qui a commencé par parler d’une même voix, s’est fragmentée. La logique du chacun pour soi l’a emporté sur la profession de foi de l’unité. En Afrique de l’Ouest, le Ghana et la Côte d’Ivoire ont fait bande à part pour, déclaraient-ils, ne pas pénaliser leurs exportations. Passé la première date butoir du 31 décembre 2007 en effet, seuls les matières premières des PMA (pays les moins avancés) pouvaient bénéficier de l’accès privilégié au marché européen, ce qui excluait d’emblée le cacao ghanéen et ivoirien.
Encadré
Article 16 relatif à la clause de la nation la plus favorisée
« La partie UE accordera à la partie Afrique de l’Ouest tout traitement tarifaire plus favorable qu’elle accordera à une partie tierce si l’UE devient partie à un accord préférentiel avec une tierce partie après la signature du présent accord (…) La partie Afrique de l’Ouest accordera à la partie UE tout traitement tarifaire plus favorable accordé à un partenaire commercial autre que les pays d’Afrique et des Etats ACP, ayant une part des échanges mondiaux supérieure à 1.5% et un taux d’industrialisation mesuré par le ratio de valeur ajoutée manufacturière rapportée au PIB supérieur à 10%, dans l’année précédent l’entrée en vigueur de l’accord. Si l’accord préférentiel est signé avec un groupe de pays agissant individuellement, collectivement ou à travers un accord de libre échange, le seuil relatif à la part des échanges commerciaux mondiaux considérée s’élèvera à 2% »