Intitulé « Who Will Be the Next President of the African Development Bank? », le débat tenu le 24 avril 2025 à Washington, à l’invitation de l’Institut Brookings, aura eu le mérite de mettre en lumière une réalité : le Tchadien Mahamat Abbas Tolli a eu recours à un casque de traduction pour suivre la conversation. À moins que cela n’ait été un choix délibéré ! À sa décharge, l’ancien président de la Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC) pourrait rétorquer que le Zambien Samuel Munzele Maimbo et la Sud-Africaine Swazi Tshabalala ne semblent maîtriser que le mot bonjourdans la langue de Voltaire. Un détail, direz-vous ? Peut-être. Mais les statuts de la Banque Africaine de Développement (BAD) sont clairs : les deux langues de travail de cette institution sœur de l’Union Africaine (UA) sont le français et l’anglais. Une règle que l’institution, sise Avenue Joseph Anoma à Abidjan, semble avoir quelque peu oubliée ces dernières années.
Bref, seuls Sidi Ould Tah et Amadou Hott se sont montrés véritablement à l’aise dans l’exercice du bilinguisme. Le Sénégalais, soucieux de ne pas apparaître comme le simple candidat d’Adesina – son mentor parfois encombrant –, a tenu à souligner qu’il ne s’inscrit ni dans la rupture ni dans la continuité. Candidat « de l’interne », tout comme la Sud-Africaine Swazi Tshabalala, comptable des succès et des limites de l’ère Adesina, l’ancien ministre de l’Économie du Sénégal a livré un discours fédérateur. Pour sa part, le Mauritanien Sidi Ould Tah, qui a dirigé la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA), a rappelé les recettes éprouvées de cette institution et mis l’accent sur la nécessité de remobiliser les actionnaires.
Dans l’ensemble, dans ce débat riche organisé par Brookings , tous les candidats ont abordé les grands défis du moment : l’emploi des jeunes, la transition énergétique, ou encore le financement des pays fragiles.
Les cinq candidats
1. Amadou Hott (Sénégal)
Ancien ministre de l’Économie du Sénégal et ex-vice-président de la BAD, il met l’accent sur la transition énergétique, les infrastructures vertes et la mobilisation du capital privé pour soutenir le développement durable.
2. Sidi Ould Tah (Mauritanie)
Ex-ministre des Affaires économiques et ancien directeur général de la BADEA, il défend une approche fondée sur la coopération Sud-Sud et le renforcement des partenariats arabo-africains.
3. Swazi Tshabalala (Afrique du Sud)
Seule femme candidate, première vice-présidente et directrice financière de la BAD, elle plaide pour une institution plus audacieuse, réactive et inclusive, avec un fort accent sur l’efficacité opérationnelle et l’impact terrain.
4. Mahamat Abbas Tolli (Tchad)
Ancien gouverneur de la BEAC, il met en avant son expérience en matière de stabilité macroéconomique et de gestion monétaire pour renforcer la solidité financière de la Banque.
5. Samuel Munzele Maimbo (Zambie)
Économiste ayant fait carrière à la Banque mondiale, il insiste sur l’importance de la gouvernance, de la transparence et de l’intégration régionale comme leviers du développement économique du continent.
L’élection du prochain président de la BAD est prévue le 29 mai 2025, lors des Assemblées annuelles de l’institution à Abidjan. Ce débat a constitué une plateforme précieuse pour comparer les visions et les priorités des candidats, à un moment où la BAD joue un rôle stratégique dans le développement économique et social de l’Afrique.