De notre envoyé spécial à Djibouti, Abdoulaye Ba, reporter.
Africa Finance Corporation (AFC) en super bailleur du premier IPP du pays
Ce 10 septembre 2023, une cérémonie de lancement marquante a eu lieu à Djibouti, pays stratégique, situé dans la Corne de l’Afrique. Le président Ismaïl Omar Guelleh a procédé à l’inauguration historique du tout premier parc éolien du pays, incarnant ainsi son ambition annoncée de faire d’en faire le premier d’Afrique à s’appuyer exclusivement sur des sources renouvelables pour son électricité d’ici 2035.
Le parc éolien Red Sea Power (RSP), à proximité de la baie de Ghoubet, fournira 60 mégawatts d’énergie propre, augmentant de 50 % la capacité globale et évitant annuellement 252 500 tonnes d’émissions de CO2 soit l’équivalent de plus 55 000 bus. Le site s’étend sur 387 hectares, soit l’équivalent de plus de 700 terrains de football. Les 17 turbines Siemens du parc produisent chacune 3,4 MW, desservies par une sous-station de 220 mégavolts ampères (MVA) et reliées par une ligne de transmission aérienne de 5 km au gestionnaire de réseau local et aux installations d’entreposage.
Le projet, premier investissement international notable dans le secteur énergétique à Djibouti, d’un montant de 122 millions USD, crée le premier producteur indépendant d’électricité (IPP) du pays et servira de modèle aux futurs investissements privés.
Une capacité supplémentaire de 45 MW d’énergie renouvelable est déjà attendue par le consortium d’investisseurs dirigé par RSP et composé du fournisseur de solutions d’infrastructures Africa Finance Corporation (AFC) en tant que développeur principal ; de la banque néerlandaise de développement entrepreneurial FMO ; du gestionnaire de fonds de financements mixtes Climate Fund Managers (CFM) ; et de Great Horn Investment Holding (GHIH), une société d’investissement détenue par une unité de l’Autorité des Ports et des Zones Franches de Djibouti et du Fonds Souverain de Djibouti.
Jusque-là, Djibouti dépendait entièrement d’une électricité obtenue à partir de combustibles fossiles importés, ainsi que de l’électricité produite de l’hydrogène importée de l’Éthiopie voisine. Moins de la moitié des 123 MW de la capacité nationale installée est peu opérationnelle en raison de l’ancienneté des centrales au diesel.
La nouvelle centrale éolienne stimulera l’industrialisation, la création d’emplois et la stabilité économique alors que Djibouti cherche à tirer parti de sa position stratégique en tant que plaque tournante mondiale du transbordement.
Le pays dispose de suffisamment de ressources éoliennes, solaires et géothermiques pour tripler sa capacité actuelle et dépasser les 300 MW. Djibouti accueille également la plus forte concentration au monde de bases militaires étrangères en raison de sa situation géographique à l’entrée du détroit de Bab el-Mandab, le corridor emprunté par 30 % du commerce mondial. Le nouveau parc éolien fournit une opportunité pour ces bases et d’autres entreprises actuellement hors réseau de se décarboner et de remplacer leur électricité produite principalement par du diesel par une énergie propre.
Tirant parti de ses ports maritimes pour diversifier l’économie, Djibouti a entrepris de construire une zone industrielle en 2017, suscitant au passage des discussions préliminaires sur le renforcement des capacités énergétiques. Le consortium du parc éolien a été créé en 2018 et a par la suite fourni un prêt-relais par capitaux propres via AFC, FMO, le Fonds Climate Investor One de CFM, et GHIH, qui ont permis au projet de boucler son financement en un temps record (22 mois). Les travaux ont débuté en janvier 2020 et se sont poursuivis à un rythme soutenu malgré les défis d’approvisionnement mondiaux causés par les confinements de la période Covid.
Faire de Djibouti la première économie africaine à 100 % propre et verte
Des personnalités de haut niveau, telles que le président Ismail Omar Guelleh, le Premier ministre Abdoulkader Kamil Mohamed et le ministre de l’Énergie Yonis Ali Guedi, étaient présents. Cette initiative vise à faire de Djibouti la première économie africaine à 100 % propre et verte, fonctionnant uniquement à l’énergie solaire et éolienne.
Le projet est en phase avec la Vision 2035 de Djibouti, qui prévoit la création de zones économiques spéciales et d’infrastructures logistiques.
L’énergie générée par les nouvelles installations renouvelables soutiendra non seulement l’industrialisation neutre en carbone mais pourra aussi être utilisée pour alimenter une nouvelle installation de transformation écologique pour le ravitaillement des navires de transbordement.
L’Africa Finance Corporation (AFC) a joué un rôle crucial dans le financement du projet. Selon Samaila Zubairu, CEO de l’AFC, institution qui a déjà déployé 12,6 milliards de dollars dans des projets à travers le continent, ce projet est « vraiment spécial » car il démontre ce qui est possible en termes de développement durable en Afrique ».
Un autre élément distinctif du projet est son engagement envers les communautés locales. «Par exemple, poursuit le patron de l’AFC, « une usine de dessalement a été intégrée dans le projet pour fournir de l’eau propre aux régions mal desservies, réduisant ainsi les risques de maladie et libérant du temps, notamment pour les femmes et les filles, pour l’éducation et l’emploi rémunéré».
Ce parc éolien est donc plus qu’une simple avancée technologique; il est le symbole d’un changement positif et durable qui, selon ses partisans, pourrait servir de modèle pour le développement futur en Afrique et au-delà.