Surnommé Rambo, l’ancien premier ministre et président de la République Mauricienne, Sir Anerood Jugnauth (le grand SAJ), est décédé jeudi 3 juin à l’âge de 91 ans après 56 ans de présence dans la vie politique de ce pays-île. Six fois premier ministre et président pendant 9 ans, il était l’antithèse du dirigisme à la Poutine pour lequel la démocratie doit s’effacer devant la raison d’Etat et l’économie. Leader de l’opposition politique entre 1976 et 1982 dans un parti politique, le MMM, d’obédience marxiste, il devient premier ministre pour la première fois en 1982, enchainant quatre mandats sous le signe de la démocratie, de l’économie du marché et de l’Etat providence.
A son accession au poste de premier ministre, Maurice menaçait de sombrer sous le poids d’un déficit budgétaire élevé, d’un taux de chômage olympique, d’une inflation record et d’une double dévaluation du Rupee. Tombueur de sir Seewoosagur Ramgoolam, le SAJ n’avait pas d’autre choix que de faire face aux urgences en offrant aux investisseurs internationaux une zone franche industrielle aux conditions imbattables, en réajustant la fiscalité à la baisse, en ouvrant la Bourse de Maurice (Mauritius Stock Exchange) en 1989 et , sur un autre plan, en maintenant l’anglais comme langue officielle en lieu et place du créole.
Une politique d’ouverture qui passe aussi par les institutions de Bretton Woods qui ne demandaient ni plus ni moins que la suppression de la gratuité de l’éducation, des subventions sur la farine et le riz. Là aussi, il négociera fin en ne cédant pas à toutes les exigences tout en restant pragmatique. Sollicité pour 30 millions de dollars, le FMI exigera donc des réformes douloureuses aux allures de politique d’austérité à l’encontre des critiques de Sir Anerood Jugnauth contre le gouvernement des travaillistes (Labour Party) qu’il vilipendait. De 1982 à 1995, années pendant lesquelles il a dirigé le gouvernement, l’île Maurice a vécu une profonde évolution économique. De 1984 à 1988, le taux de croissance a évolué de 7 % en moyenne. Du pays exportateur de canne à sucre et des usines de textile , Maurice est devenue une plateforme de services à haute valeur ajoutée en finance et en informatique, destinée à l’Inde et à l’Afrique.