Pour Carlos Lopes, Secrétaire général de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), les banques ont un rôle clé à jouer dans la transformation de l’Afrique. Le renouveau de l’Afrique suppose des ruptures fondamentales. « L’Afrique doit s’approprier le récit de son développement et de ses performances, être à tout moment capable de produire des données, des statistiques et des mesures fiables. Plus que l’agrégation des quantités, la transformation est une stratégie de rupture« . Entretien.
L’innovation et la quête du savoir font partie des thèmes dominants de cette année dans les conférences organisées par la CEA ? Quel rôle doivent jouer les banques dans ce processus ?
Les banques sont des vecteurs de la transformation économique. Actuellement, 80 milliards de dollars dorment dans ces établissements financiers. Des instruments financiers adéquats peuvent contribuer à mobiliser ces fonds au service
du développement. C’est là où l’innovation financière à travers la recherche de produits adaptés au contexte africain peut favoriser le développement. La mobilisation des ressources domestiques au service de l’économie passe aussi par l’élargissement des activités des banques commerciales africaines qui n’interviennent que marginalement dans l’intermédiation des flux générés par les exportations des hydrocarbures et des minerais. C’est un manque à gagner énorme pour nos économies.
Comment drainer ces ressources domestiques?
La mobilisation des ressources domestiques est une nécessité à plus d’un titre. D’abord, ces ressources existent. Il y a des liquidités disponibles à moindre frais à travers nos banques centrales et des institutionnels comme les caisses de retraite et les compagnies d’assurances. Il y a là autant de fonds qui peuvent être drainés via des véhicules financiers adaptés au bénéfice de l’investissement dans les infrastructures et dans l’industrialisation du continent. Plus que jamais, le temps est venu de changer de paradigme. Qu’on consacre plus de temps à penser aux IDE et aux transferts de la diaspora qu’à l’aide au développement.
Toutes les logiques fondées sur le seul financement du développement par la coopération ont échoué. Ladite aide au développement, de 56 milliards de dollars en 2011(flux financiers et annulations de dettes), même supérieure aux IDE (50 milliards de dollars) ne consacre qu’à peine 2% de ses fonds au secteur productif. L’aide au développement est nettement
inférieure aux transferts de la diaspora africaine (62 milliards). Ce dernier volet a besoin de toute la sollicitude du secteur bancaire
et financier en général pour une transformation qualitative. Le système bancaire doit innover pour accompagner et canaliser ce flux vers l’investissement productif nécessaire à la transformation de l’Afrique.
Faut-il le rappeler, les coûts de transferts vers l’Afrique sont les plus élevés au monde. Si ce coût peut être ramené à environ 5%, les économies africaines pourraient épargner jusqu’à 4 milliards de dollars annuels. En investissant ce compartiment, les banques peuvent inverser la donne et favoriser l’usage optimal des transferts de la diaspora.
On a parlé d’innovation et de savoir lors du Forum économique de la CEA à Marrakech. Doit-on réinventer la roue en Afrique ?
L’innovation et la quête du savoir sont des déterminants de la croissance qualitative dont il est question. Ces deux axes constituent des paramètres essentiels dans la transformation de l’économie africaine, laquelle ne doit pas reposer uniquement sur les exportations de matières premières. Or, pour passer de la collecte des ressources à l’industrialisation, nous avons besoin d’innover et de valoriser nos expériences. La success story de l’inclusion financière réussie au Kenya à travers le M Pesa, les exemples de tablette smartphone créée par le jeune congolais, Verone Mankou, le cardiopad du jeune camerounais Arthur Zang, et, entre autres la Saphonienne (appareil qui utilise la force du vent) inventé par le tunisien Anis Aouini, sont des exemples qui participent au renouveau de l’image de l’Afrique. La transformation passe aussi par la maîtrise de l’image et du récit. L’Afrique doit s’approprier le récit de son développement et de ses performances, être à tout moment capable de produire des données, des statistiques et des mesures fiables. Plus que l’agrégation des quantités, la transformation est une stratégie de rupture.
Est-ce que cet élan positif d’une Afrique en forte croissance n’est pas remis en cause aujourd’hui par la fièvre Ebola?
Il faut le dire, il y a eu une mauvaise communication sur Ebola qui rappelle à tout point de vue la fièvre SRAS qui s’était abattue sur les pays. de l’Asie du Sud-Est il y a quelques années. L’alarmisme de certains avec des chiffres privilégiant des scénarios catastrophes ont contribué à la psychose. Certains États africains ont aussi pris des mesures parfois disproportionnées contribuant à isoler les pays touchés. Aujourd’hui c’est toute l’image du continent qui est associée à Ebola qui ne concerne,
à l’heure où nous parlons, que trois pays représentants moins de 1% de nos économies. Il y a des leçons à tirer et une meilleure coordination à trouver entre États pour faire face, ensemble, aux risques communs.
Vous avez initié plusieurs réformes depuis votre arrivée à la tête de la Commission Économique pour l’Afrique, il y a deux ans. Quelles sont les nouvelles orientations de cet organisme ?
La CEA est un laboratoire d’idées pour l’Afrique. Nous devons évoluer vers un véritable Think Tank en faisant de la prospective et en accompagnant la transformation du continent. D’où notre injonction à nos experts à augmenter le rythme de leur production scientifique en contribuant intellectuellement au débat économique et social sur l’Afrique. Désormais, nos chercheurs
sont tenus à publier au moins trois études /articles dans les revues scientifiques reconnues. Ce sont là des exigences internes mais aussi des attentes externes. Nous développons des partenariats avec tous les grands centres de réflexions sur l’Afrique comme récemment avec le partenariat signé avec le Codesria.
Propos recueillis par Adama Wade
2 commentaires
Dans le continuum de l’interview de M. Lopez et à la suite de la rediffusion, hier et ce jour, sur la chaîne de télévision panafricaine Africable du débat « Les banques financent-elles le développement en Afrique? » auquel j’ai participé et qui a suscité des échanges avec certains internautes.
Au regard de la pertinence des questions qui m’ont été posées et des interrogations soulevées, j’ai estimé vous les faire partager, sur notre site favori, avec mes éléments de réponse.
QUESTION : Dans la finance moderne, les fonds propres constituent la pierre angulaire. Pourquoi ne pas ouvrir les capitaux des banques ? La BCEAO avait imité la banque centrale du Nigeria pour augmenter les fonds propres (l’UEMOA avait tablé sur 10 milliards). On en est où avec ses leviers?
REPONSE :
1- Aujourd’hui l’une des faiblesses des économies de la sous-région réside dans le faible dynamisme du marché financier. Peu de banques de l’UMOA sont cotées à la BRVM. Or si vous prenez les grosses banques maghrébines et sud-africaines et même tout près de nous les banques nigérianes, elles sont toutes cotées en bourse et participent ainsi à l’animation et à la dynamique du marché financier de céans et donc à un niveau de financement correct de l’économie (dans l’UMOA, ce taux n’est que de 21% tandis qu’au Maroc il est de 85% et dans d’autres pays africains l’économie est même surfinancée par les banques). J’ai eu à proposer, en bien de lieux, qu’une partie importante du capital des banques de l’UMOA (la partie flottante) soit ouverte au public à travers la bourse. Cela présente plusieurs intérêts dont la levée de fonds (avec 14%, l’UMOA a le taux de mobilisation de l’épargne intérieure le plus faible du monde) et le renforcement de la gouvernance au sein des établissements de crédit qui seront astreints à plus de transparence financière.
2- S’agissant de la seconde question relative au relèvement du capital minimum des banques, je me suis déjà exprimé à ce sujet (Lire mon article « Le capital minimum des banques en Afrique : aspects réglementaires et pratiques » publié par le site de Les Echos en France le 30/05/14)
En voici un large extrait: » Le Conseil des ministres de l’Union a décidé, en sa session ordinaire du 17 septembre 2007, de relever le capital social minimum applicable aux banques de l’Union Monétaire ouest-africaine (UMOA) à 10 milliards. En application de cette décision, il est précisé que :
• Le capital social minimum est porté, dans une première phase, à 5 milliards pour les banques, à compter du 1er janvier 2008. Les banques et établissements financiers en activité doivent se conformer à ces nouveaux seuils au plus tard le 31 décembre 2010 ;
• La date d’application du seuil de 10 milliards pour les banques sera indiquée à l’issue de la première phase.
Le capital minimum de FCFA 5 milliards en vigueur dans l’UMOA depuis le 1er janvier 2011 n’est pas respecté par tous les établissements de crédit en activité. Selon le rapport annuel de la Commission Bancaire de l’UMOA, il y avait encore 24 banques à fin décembre 2012, soit 23 % de l’ensemble du secteur bancaire, qui ne respectaient pas cette norme prudentielle.
La question suivante s’impose : si, après un délai de cinq ans, 1 banque sur 4 n’arrive toujours pas à respecter le minimum réglementaire de FCFA 5 milliards (environ 7,5 millions d’euros), quelle situation prévaudrait lorsque l’obligation sera faite aux assujettis de relever leur capital social à 10 milliards de FCFA (environ 15 millions d’euros) ?
Sous ce prisme, une extrapolation hasardeuse, mais probable devrait ramener le nombre de banques de 105 banques à moins d’une cinquantaine dans la zone UEMOA.
D’autant plus que cette nouvelle norme est même insuffisante par rapport à la pratique observée dans d’autres pays sur le continent.
– Au Maroc, le capital minimum d’une banque est fixé à 200 millions de dirhams (environ 18,2 millions d’euros) suivant la loi n°34-03 relative aux établissements de crédit et organismes assimilés promulguée par le dahir n° 1-05-178 du 15 Moharrem 1427 (14 février 2006) ;
– En Algérie, d’après l’ordonnance n° 0311 du 26/08/2003 relative à la monnaie et au crédit, le capital minimum requis pour une banque est fixé à 10 milliards de dinars (100 millions d’euros environ) ;
– En Tunisie, la loi bancaire n° 2006-19 du 2 mai 2006 modifiant la loi 2001-65 du 10 juillet 2001 dispose que toute banque doit justifier, lors de sa création, d’un capital minimum de 25 millions de dinars (soit 11,275 millions d’euros).
En Afrique de l’Ouest, au Ghana, le capital minimum réglementaire a été relevé à 60 millions de cédi ghanéen (environ 22 millions d’euros) en 2012. Il devrait atteindre prochainement 120 millions de cédi ghanéen (44 millions d’euros) dans le cadre de la poursuite de l’assainissement du secteur bancaire.
Au Nigéria, la banque centrale exige un ticket d’entrée plus élevé. La restructuration du marché bancaire intervenue en 2005 dans ce pays a nécessité le relèvement du capital social des banques de 200 millions de nairas (1,3 million d’euros) à 25 milliards de nairas (163 millions d’euros). Cette vaste « opération d’aseptisation » a permis de réduire drastiquement le nombre de banques qui est passé de 89 à 25. Elle a surtout contribué à l’émergence de véritables « champions bancaires », capables de rivaliser avec leurs géants sud-africains. »
QUESTION : Mais pourquoi nous sommes si réticent à l’introduction de nos entreprises à la Bourse. Précisément au Mali, à ce jour nous n’avons pas ne serait-ce qu’une entreprise à la BRVM. Prenons le cas de la BOA qui est même au Mali , et qui n’est pas encore cotée à notre bourse sous régionale alors que les autres filiales du Burkina, Sénégal…. sont bien cotées à la BRVM ?
REPONSE : Approfondissons ensemble le sujet à travers vos interrogations. Je disais tantôt qu’il y avait une forte corrélation entre le niveau de développement économique et le dynamisme au niveau du marché financier. La pertinence de votre constat – en citant deux pays le Burkina et le Sénégal (sans compter le géant ivoirien qui représente près de 40% du PIB de l’UEMOA) – peut s’apprécier à travers une lecture faciale du dernier rapport annuel de la Commission Bancaire. A la page 28, le secteur bancaire malien a été relégué en 4ème position avec 12,6% (exprimé en total bilan) presque à égalité avec le Bénin (12,5%) et bien loin derrière la Côte d’Ivoire (27,5%) et le Sénégal (20,4%). Il est devancé pour la seconde fois par le Burkina Faso (13,7%). Autrement dit, le secteur bancaire malien évolue vite que celui de la zone UMOA. Pourtant, le Mali dispose d’un réseau bancaire conséquent (434 points de vente), presque le double de celui du Burkina (231) et bien plus que celui du Sénégal (367). A l’évidence, l’embonpoint n’est pas toujours synonyme de bonne santé. Revenons à l’exemple que vous citez, la BOA. Ce groupe est aujourd’hui contrôlé par la banque marocaine BMCE (2ème banque privée du Maroc). J’admets qu’il est difficilement admissible à la compréhension générale qu’une telle dissymétrie – et non asymétrie – puisse être observée au sein d’un même groupe bancaire et d’autant, vous le soulignez, la saga africaine de ce groupe a commencé au début des années 80 à partir du Mali avec son fondateur emblématique Paul DERREUMAUX. Je reviens maintenant à votre question centrale: pourquoi sommes-nous aussi rétifs – et non réticents – à l’introduction de nos banques – et non nos entreprises – à la Bourse ? Je voudrais tout de suite préciser qu’on n’adhère pas à la culture boursière par surprise ni par envie. C’est du costaud qui engage l’avenir de la banque, de ses fondateurs et/ou dirigeants. Certes c’est d’abord une volonté – innée, suscitée ou imposée – mais c’est aussi et surtout de la préparation. Pour le reste, je vous renvoie à mes articles sur la gouvernance bancaire en Afrique (publiés par Financial Afrik, Les Echos (Le Cercle), Huffington Post, mon blog,…) et bientôt à mon ouvrage sur les « Fables de la gouvernance bancaire en Afrique » dont j’ai déjà publiés plusieurs articles sur mon blog.
QUESTION : Le problème soulevé relève du niveau d’introduction de la finance moderne dans le tissu économique. L’épargne est moins développée et pas très orientée dans nos pays. D’aucuns diront que c’est par rapport au niveau de revenu, pas forcément. L’épargne interne devrait constituer une véritable manne de financement des différents tissus économiques à conditions que son développent soit encouragé avec des dispositifs réglementaires, fiscaux.
REPONSE : Vous faites bien de mettre le curseur sur la faiblesse de l’inclusion financière dans nos pays. Je vais remettre un second couvert à mon analyse. Dans un de mes articles consacré à la bancarisation en Afrique (publié par Financial Afrik et Les Echos), je faisais observer: « La mobilisation de l’épargne intérieure est aussi un vrai défi pour l’Afrique qui présente le taux le plus bas du monde. Il n’est que 18% du PIB en Afrique (14% pour l’UEMOA) contre 26% en Asie du Sud et 43% en Asie orientale. Les économistes admettent que pour maintenir un taux de croissance robuste à deux chiffres, il faut au moins que l’épargne intérieure brute atteigne au moins 25 à 30% du PIB. » Et j’ai proposé plusieurs solutions innovantes : la création de « zones franches bancaires », la prise de « mesures non conventionnelles », la création de la Banque publique d’investissement (BPI),… Elargissons le débat au reste de l’Afrique. Les développeurs, les bras financiers des talentueux géomètres qui ont saucissonné l’Afrique à la Conférence de Berlin en 1885, ont à leur tour découpé le continent en trois morceaux, en détachant les deux extrémités (Afrique du Nord et Afrique du Sud). Le premier morceau, ils l’ont ajouté au Moyen-Orient cela a donné le MENA (acronyme anglais composé de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient). Le second morceau, l’Afrique du Sud a été ajouté aux quatre pays émergents qui forment le BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine) cela a donné les BRICS.
Il reste finalement le « ventre mou », la plus vaste (48 sur 54 pays) mais la plus démunie et la plus fragile, ce qu’ils appellent Afrique subsaharienne, ou Afrique Noire ou tout uniment Afrique. Et là aussi ils l’ont mis en pièces détachées (francophone, anglophone, lusophone ; occidentale, orientale, centrale, australe…). Pour autant, on enfile à tous ces pays la taille unique. Parcourez les rapports des organisations internationales et vous m’en direz des maux – et non des mots sur cette figure imposée. L’Afrique a été et continue d’être fragmentée, au vu et au su des dirigeants africains. Au nez et à la barbe de l’élite africaine. A tel point qu’il n’y a plus une Afrique mais des Afriques, divisées, morcelées et affaiblies.
En ramenant ce découpage à la situation de la bancarisation sur le continent, on retrouve globalement les mêmes résultats. Les deux extrémités (Afrique du Nord et Afrique du Sud) affichent un niveau de pénétration bancaire au-dessus de la barre des 50%. Le reste de l’Afrique, avec des fortes nuances, présente un taux moyen de bancarisation de 10%.
QUESTION : une question pour un expert! Savez-vous ce qu’il en est du développement de la finance islamique au Mali ?
REPONSE : Merci M. Sangaré pour votre question, même si je ne puis prétendre au statut d’expert.
La finance islamique est une vraie opportunité pour les pays africains pour la mobilisation de capitaux nécessaires au financement de leur économie. C’est un véritable complément au secteur financier conventionnel. Avec un taux de croissance annuelle de 20 à 30% sur les dernières années, la finance islamique a représenté environ 1 500 milliards de dollars d’actifs, à l’échelle mondiale à fin 2013, d’après “The Center of Islamic Banking and Islamic Economics (CIBE)’’ cité par la Commission Bancaire de l’UMOA. Par exemple, les systèmes financiers en Iran et au Soudan sont entièrement islamiques. Au Koweït, la part de marché dépasse les 60% et en Arabie Saoudite, c’est près de 40%.
Au niveau de la zone UEMOA, la banque centrale (BCEAO) a pris plusieurs initiatives pour promouvoir ce financement alternatif. Le 7 septembre 2012, elle a signé un protocole d’accord avec la BID. En mars 2014, le Comité de politique monétaire(CPM) a approuvé la recevabilité aux guichets de refinancement de la BCEAO des obligations islamiques dénommées « Sukuk » que l’Etat sénégalais envisagerait d’émettre sur le marché financier régional. Dans le dernier rapport annuel de la Commission Bancaire de l’UMOA publié en septembre 2014, une large place est consacrée à la finance islamique (Encadré N°3, p. 69-71).
Et dans ce domaine, le Sénégal fait office de pionnier au niveau de la sous-région. La Banque Islamique du Sénégal (BIS) a été créée le 20 juillet 1982 sur les vestiges de l’ex-Masraf Fayçal Al Islami. Son évolution a été protéiforme. En 1996, face à des difficultés persistantes, la BID fit son entrée au capital de cette banque à hauteur de 33% (son représentant assure la présidence du CA de la BIS).
Au Mali, la finance islamique est inexistante. Aucune initiative n’a été réalisée dans ce domaine. Pourtant, un vrai potentiel existe. Une partie de la population sensible aux critères financiers de la « Charia » pourrait être bancarisée et se voir financer les activités. Il est fort probable que les trois groupes bancaires marocains, à la faveur de l’évolution institutionnelle financière dans leur pays, puissent faire jouer les précurseurs à leurs filiales maliennes.
Mais, le chemin reste long. Les reformes doivent être poursuivies au niveau du Régulateur communautaire (révision de la loi-cadre portant réglementation bancaire) et des Etats parties (dispositions fiscales) pour que la finance islamique puisse jouer pleinement son rôle dans le paysage financier sous-régional.
Par exemple, la Zakat (2,5%) est prélevée sur les profits de la banque, conformément à la loi islamique, alors que l’impôt provenant des revenus est une décision d’Etat. De ce fait, la banque islamique est soumise à une double imposition. Le maintien d’un tel système ne peut que créer des distorsions de concurrence, ce qui est contraire aux dispositions communautaires.