« 5 milliards d’euros ont été investis dans les énergies renouvelables au Maroc. Presque autant est prévu d’ici 2030« , déclare d’emblée Aziz Rebbah, ministre marocain de l’Énergie, des Mines et du Développement durable. Intervenant jeudi 16 juillet en marge de la deuxième édition des Global Mind Talks organisé par le cabinet de conseil expert en stratégie et relations publiques GLOBAL MIND CONSULTING et BDO Maroc, consacrée aux partenariats dans les infrastructures, le ministre estime que le taux d’électrification rurale dans le royaume est de 99,7% avec un objectif d’aller au delà de l’éclairage pour accompagner les activités socio-économiques.
Situé à la croisée des interconnexions logistiques et énergétiques entre l’Europe et l’Afrique, le Maroc présente un mix énergétique constitué d’énergie renouvelable à 40% avec un objectif de porter ce ratio à 52% grâce à l’auto-production et au rôle grandissant du secteur privé. Au Sénégal aussi, la transformation passe par une loi sur les PPP visant à encadrer le partenariat public-privé, souligne Abdou Karim Fofana, ministre de l’Urbanisme, du logement et de l’hygiène publique. « jusqu’en 2012, le Sénégal n’avait pas plus de 32 km d’autoroutes. En 7 ans, nous avons ajouté plus de 200 km d’autoroutes depuis lors et doublé la puissance électrique du pays qui compte, par ailleurs, un accès à l’eau à plus de 93% en milieu urbain ».
Le rôle du secteur privé
Le décors présenté par les deux ministres et Seynabou DIA, CEO de Global Mind Consulting, élargit le débat aux experts intervenants invités avec notamment le banquier d’affaires Moustapha Sow, CEO de SF Capital, pour qui le financement des infrastructures énergétiques à travers le partenariat public-privé se fait communément à travers le Power Purchase Agreement (PPA), avec des garanties de l’Etat. « c’est le modèle idéal pour le secteur de l’énergie, mais aussi des routes, aéroport et santé ». Mais, ajoute le banquier d’affaires, à l’exception de l’énergie, il y a un marché de liquidités qui n’est pas utilisé. « Nos Etats avaient recours à l’endettement souverain, auprès de la Chine et de la Turquie, devenus nos principaux bailleurs. Le contexte d’aujourd’hui nous oblige à repenser à tout cela. Le bon côté de la covid-19, s’il existe, nous oblige à revoir la manière de financer nos infrastructures avec des capacités d’endettement de plus en plus réduites ». Pour le financier sénégalais, des lois PPP très claires devront inciter les bailleurs comme la BID, la BAD, et, entre autres, la Banque Mondiale à revoir leurs critères d’endettement.
Clusters de PMEs pour améliorer le local content
De son côté, Thérèse SEKEMANA, CEO LED Solutions and Green Energy Rwanda, qui développe deux centrales d’hydro-électricité dans son pays, estime que l’expertise est essentielle. « Par exemple, notre domaine est nouveau. Il faut trouver des partenaires qui viennent pour le long terme », appelant à faire la différence entre l’accès à l’éclairage et l’accès à l’énergie. De son côté, Mouhamadou Abass Sall, Architecte et fondateur de LAMTÔRO GROUP, attire l’attention sur la dissociation entre le temps des projets d’infrastructures, forcément long et le temps politique, court et cyclique alors que Zakaria Fahim, qui travaille avec 12 clusters de PME au Maroc, invite ces dernières à travailler en groupement pour améliorer le local content. La rupture des chaînes de financement international invite l’Afrique à revisiter ses architectures financières en interne ont reconnu la plupart des intervenants. « Il nous faut dès lors apprendre à mobiliser les ressources à long terme sur la base de l’épargne locale, régionale ou continentale », suggère Dr Edoh Kossi Amenounvé, directeur général de la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM). » La crise nous oblige à relever le défi de la réduction de la dépendance par une approche régionale et internationale, plus pertinente qu’une approche nationale ».
Au delà de ses objectifs de rattrapage des infrastructures, le partenariat public-privé doit donc jouer un effet d’entrainement des PME et créer des emplois et un développement social. Le PPP est aussi une réponse aux limites posées par l’endettement et le déficit budgétaire, rappelle Moustapha Sow, invitant le secteur privé africain à s’ouvrir au partenariat. Au Maroc, le PPP est allé de pair avec la préférence nationale. « Les projets d’infrastructures sont développées à 95% par des sociétés de droit marocain », explique le ministre Aziz Rebbah. « Les accords internationaux l’acceptent », poursuit-il en rappelant que la majorité des entreprises internationales engagées dans les projets PPP ont créé des filiales au Maroc. « Il faut créer des champions nationaux s’ils n’existent pas », a encore dit le ministre Aziz Rebbah. Le webinaire étant dédié au partenariat dans les infrastructures, il a été largement question des conditions d’investir et de co-investir au Maroc et en Afrique subsaharienne. Les deux ministres se sont montrés favorables aux dynamiques de partenariat inter-africains à travers des joint-ventures africaines.