Par Nadia Hamilton CTA, Associée et experte fiscale de M&H Consulting Africa .
Fin mars, le monde de la finance et du conseil est secoué par une annonce retentissante : PwC décide de retirer sa marque à ses filiales francophones, implantées notamment en Côte d’Ivoire, au Cameroun et dans plusieurs autres pays de la région.
Ce retrait marque un véritable séisme dans le secteur de l’audit et du conseil. Il s’agit en effet du premier cabinet francophone en termes de parts de marché, tant en audit qu’en conseil, et du plus ancien par son implantation dans la région. PwC s’était imposé comme une référence incontournable, auteur de nombreux ouvrages de référence et partenaire privilégié de grandes entreprises locales et internationales.
L’annonce soulève de nombreuses interrogations. Que signifie concrètement « retirer sa marque » à ses propres filiales, surtout à l’approche des clôtures d’exercice comptable ? Comment les entreprises clientes, notamment les multinationales, doivent-elles s’organiser pour assurer la continuité de leurs audits, sachant que la marque PwC est souvent perçue comme un gage de rigueur et de fiabilité ?
Enfin, quel message ce départ envoie-t-il aux investisseurs internationaux, alors que le continent africain cherche à attirer davantage d’opportunités ? Pour beaucoup, cette décision rappelle les retraits progressifs opérés autrefois par certaines grandes banques étrangères.
Les implications du retrait de la marque PWC
Peu d’informations sont disponibles sur les causes et surtout l’impact de cette séparation sur les employés et leurs clients. Nul ne peut douter que cette décision a entrainé des conséquences importantes pour certains d’entre eux.
Cependant, il convient de se poser la question de la nature de la séparation. En effet, le retrait de la marque PWC signifie que les filiales locales ne peuvent plus opérer sous le nom du géant international. Cela induit le changement de nom de la filiale locale et de ce fait, cela doit être rectifié dans les contrats en cours ainsi que dans la documentation juridique des sociétés clientes. Qu’en est-il pour la mission d’audit qui se tient sur plusieurs années ? Doit-on faire la place au commissaire aux comptes suppléant pour la période à couvrir ? De plus, la maison mère PWC doit elle se porter garante pour ces missions signées sur plusieurs années ou les nouvelles entités devront « négocier » chaque renouvellement de contrat avec les garanties y afférentes.
Dans tous les cas, elle impose de nouveaux défis juridiques et fiscaux majeurs pour une partie des principaux acteurs locaux dans un contexte mondial difficile. Faut-il pour autant réellement s’en inquiéter à moyen et long terme, pour le développement de l’Afrique de L’Ouest, en particulier dans la zone francophone ? A regarder le boom économique que connaît la région, le départ de la firme anglaise paraît, à certains égards, presque anecdotique.
L’ Afrique de l’Ouest maintient le cap
Le potentiel de l’Afrique et plus particulièrement de l’Afrique de l’Ouest francophone est réel. Et c’est généralement dans l’adversité que se révèlent les meilleurs talents et les opportunités les plus florissantes.
Certes, cette situation ainsi que le départ des banques européennes de l’Afrique francophone envoient des signaux de manque de confiance des grands groupes internationaux.
Cependant, il est important de fixer en général ses objectifs en visant la lumière au bout du tunnel. Celle-ci se décline en de nombreuses opportunités que représentent le marché africain.
La Côte d’Ivoire en symbole du dynamisme régional
Prenons le cas de La Côte d’Ivoire qui se distingue depuis plusieurs années comme un nouveau « Dragon » africain. La découverte de pétrole et de gaz ainsi que l’or et le manganèseconsolide une trajectoire de croissance bien ancrée.
Que ce soit le boom du high tech, notamment dans le domaine bancaire où la majeure partie de la population non bancarisée se tourne vers la monnaie électronique, ou encore les nombreuses facilités fiscales accordées aux industries dans le secteur agricole, énergétique ou numérique, la Côte d’Ivoire veut se donner les moyens de sa croissance et de ses ambitions.
Il convient de noter que la confiance est un facteur clé pour les opérateurs économiques. Et elle peut aussi se prouver par les multiples levés de fonds que la Côte d’Ivoire a été en mesure de sécuriser ces derniers mois.
Et les chiffres ne démentent pas. Classée parmi les pays à faible risque selon le rapport Risque Pays 2025 de Bloomfield Intelligence, la Côte d’Ivoire confirme son rôle de locomotive économique de l’Afrique de l’Ouest. Avec une note globale de 6,3/10, le pays reste solidement ancré dans la zone de confiance des investisseurs. Cette stabilité est soutenue par une performance macroéconomique remarquable (8,1/10).
Ces indicateurs traduisent une économie résiliente, portée par des fondamentaux solides, offrant ainsi un environnement favorable aux investissements durables.
Des départs d’acteurs de l’envergure de PwC ne sera évidemment pas sans conséquence. Cependant, il est indispensable de préserver l’optimisme économique ambiant et préexistant, avec, bien entendu, lucidité et réalisme. La résilience a toujours été le leitmotiv des économies africaines…Maintenons le cap !