Une méditation savante sur le devenir africain
Il est des ouvrages qui, sans céder à la facilité de l’actualité immédiate, s’inscrivent d’emblée dans le temps long de la réflexion savante. Afrique + développement : une formule qui fonctionne appartient à cette catégorie rare. Julien Briot-Hadar y propose une œuvre de synthèse et de problématisation, attentive aux héritages historiques, aux contraintes structurelles et aux potentialités encore largement sous-exploitées du continent africain. Loin des récits compassionnels ou des diagnostics désenchantés, l’auteur s’attache à restituer à l’Afrique sa pleine densité historique, politique et économique.
L’ouvrage ne se présente ni comme un manifeste militant ni comme un traité technocratique. Il relève plutôt d’une économie du savoir où l’analyse empirique, la comparaison internationale et la réflexion normative s’entrelacent. L’Afrique y est envisagée comme un espace de tensions productives, traversé par des dynamiques contradictoires mais porteur d’une capacité endogène de transformation. En ce sens, le livre s’inscrit dans une tradition intellectuelle exigeante, proche des grandes études de développement comparé, tout en assumant une posture résolument contemporaine.
Une architecture analytique de grande ampleur
L’un des mérites majeurs de cet essai réside dans la cohérence de sa construction. Julien Briot-Hadar ne juxtapose pas les thèmes, il les articule. La démographie, l’urbanisation, l’industrialisation, la gouvernance, la lutte contre la corruption, l’intégration régionale et la transition écologique sont pensés comme les composantes d’un même système. Cette approche globale permet de dépasser les lectures fragmentées qui ont longtemps dominé les études africaines.
La question démographique, souvent traitée sous l’angle de la menace, est ici réévaluée à l’aune du concept de dividende démographique. L’auteur montre avec rigueur que la jeunesse africaine peut constituer une force économique décisive, à condition que les États investissent dans l’éducation, la formation professionnelle et l’insertion dans des chaînes de valeur productives. Cette analyse, solidement étayée, rompt avec les visions alarmistes tout en évitant l’angélisme.
La gouvernance occupe une place structurante dans l’ouvrage. Refusant toute explication culturaliste de la corruption et des dysfonctionnements institutionnels, Julien Briot-Hadar privilégie une lecture juridique et politique. La corruption apparaît comme le produit de faiblesses institutionnelles, d’une séparation insuffisante des pouvoirs et d’un déficit de transparence. À cet égard, l’auteur avance des pistes concrètes, allant du renforcement de l’État de droit à l’usage raisonné des technologies numériques pour sécuriser les finances publiques et lutter contre les flux financiers illicites.
La préface de Wilfrid Lauriano Do Rego : une convergence de diagnostics
La décision de Wilfrid Lauriano Do Rego de préfacer cet ouvrage ne relève ni du hasard ni de la complaisance. Elle procède d’une convergence intellectuelle profonde entre l’analyse proposée par Julien Briot-Hadar et l’expérience de terrain de Do Rego, acquise au plus haut niveau des sphères économiques et financières africaines et internationales.
Dans sa préface, Do Rego reconnaît dans cet essai une lecture lucide des conditions contemporaines du développement africain. Il y retrouve une compréhension fine des enjeux d’industrialisation régionale, de relocalisation des chaînes de valeur et de diversification des partenariats économiques. Surtout, il adhère pleinement à l’idée selon laquelle le développement ne saurait être durable sans une gouvernance publique exigeante, fondée sur la stabilité institutionnelle et la continuité de l’action de l’État.
Son engagement s’explique également par le sérieux méthodologique du travail accompli. Loin des slogans, Julien Briot-Hadar s’appuie sur des données précises, des exemples concrets et une connaissance approfondie des mécanismes économiques africains. Cette rigueur confère à l’ouvrage une réelle utilité pour le débat public africain et international.
L’avant-propos de Mamadou Lamine Diallo : une filiation intellectuelle assumée
L’avant-propos de Mamadou Lamine Diallo confère à l’ouvrage une portée intellectuelle supplémentaire. Figure majeure de la pensée économique et politique africaine, Diallo reconnaît dans le travail de Julien Briot-Hadar une continuité avec les grandes interrogations qui traversent, depuis plusieurs décennies, la réflexion africaine sur le développement, l’autonomie économique et l’intégration continentale.
Ce qui retient particulièrement son attention est la manière dont l’auteur articule intégration économique, construction institutionnelle et souveraineté politique. L’intégration africaine n’est pas ici réduite à un slogan panafricain, mais pensée comme un processus exigeant, fondé sur des institutions financières communes, une convergence constitutionnelle et une citoyenneté partagée.
La présence de Mamadou Lamine Diallo en ouverture de l’ouvrage confère ainsi à celui-ci une légitimité intellectuelle de premier ordre, reconnaissant en Julien Briot-Hadar un interlocuteur capable de dialoguer avec les grandes traditions de la pensée africaine tout en renouvelant leurs catégories.
Une œuvre de maturité dans le champ des études africaines
Afrique + développement : une formule qui fonctionne s’impose comme une contribution majeure au débat international sur l’avenir du continent africain. Sa force tient à son refus des oppositions simplistes et à sa capacité à articuler vision stratégique et propositions concrètes. L’ouvrage s’adresse à un lectorat exigeant – chercheurs, responsables publics, diplomates, acteurs économiques – soucieux de penser le développement africain dans toute sa complexité.
En définitive, ce livre rappelle que le développement n’est jamais le produit d’un miracle, mais celui d’institutions solides, de choix politiques éclairés et d’une intelligence collective capable de se projeter dans le long terme. Par la rigueur de son analyse et l’ampleur de sa vision, Julien Briot-Hadar signe ici un essai appelé à trouver une place durable dans le corpus des grandes réflexions contemporaines sur l’Afrique.

