L’incroyable saga entre le Barreau de Côte d’Ivoire et le cabinet Thiam & Associés, un des plus importants cabinets d’avocats d’Afrique Francophone, prend une tournure inédite. Selon les informations confidentielles de Financial Afrik, le Conseil de l’Ordre ivoirien aurait, lors d’une session tenue hier 4 juin 2025, décidé de poursuivre en justice le cabinet guinéen et aurait mandaté un ancien Bâtonnier d’accomplir toutes les démarches à cette fin dans les tous prochains jours.
À ce stade, nous ne disposons pas de détails quant à savoir si ces poursuites viseraient uniquement Thiam & Associés ou l’ensemble des cabinets internationaux établis en Côte d’Ivoire. Certains observateurs de la place se demandent si le Barreau ivoirien ne semble pas déterminé à faire de Thiam & Associés un exemple, quitte à s’éloigner de l’esprit des textes. Derrière cette croisade, beaucoup voient aussi la main de quelques figures influentes du Barreau soucieuses de préserver leurs positions. Le traitement réservé à Thiam & Associés contraste d’ailleurs avec la tolérance dont ont bénéficié, sur le même schéma juridique, plusieurs cabinets non-ivoiriens opérant à Abidjan.
Le Barreau de Côte d’Ivoire avait déjà réagi une première fois le 22 mai dernier en précisant que « le cabinet Thiam & Associés, inscrit au Barreau de Guinée, n’étant pas membre d’un Barreau relevant de l’UEMOA, ne peut légalement ouvrir un bureau secondaire en Côte d’Ivoire ». Le cabinet guinéen avait réagi dès le lendemain en indiquant que « l’entité à Abidjan de Thiam & Associés ne constitue pas un bureau secondaire, mais une structure de conseil distincte et autonome, dont les activités ne relèvent pas de l’exercice de la profession d’avocat en Côte d’Ivoire et n’empiètent en rien sur le monopole réservé aux avocats inscrits au Barreau de Côte d’Ivoire ».
Cette position du Barreau ivoirien, si elle venait à se confirmer, dépasserait le seul sort d’un cabinet et poserait la question de la maturité du marché juridique ouest-africain et de la capacité du continent à faire émerger ses propres champions du droit. Il est à craindre qu’en cédant à la tentation du repli et de l’intimidation, le Barreau de Côte d’Ivoire n’envoie un signal inquiétant à tous ceux qui croient au progrès de la profession d’avocat dans la région.