La Bourse d’Istanbul n’a pas plongé contrairement aux pronostics. Tous les ingrédients étaient pourtant réunis pour faire fuir les investisseurs: une intense campagne de dénonciation de la presse occidentale accusant le président Erdogan de vouloir se transformer en un sultan des temps modernes et, surtout, le désinvestissement net des fonds américains et autres grands comptes « des pays démocratiques ».
La part des étrangers dans la dette du pays a atteint un plus bas depuis cinq ans. les investisseurs étrangers ont vendu, en net, 77 millions de dollars d’actions entre mi-février et fin mars, rapporte Reuters. La livre turque a perdu plus de 16 % en six mois, soit la pire performance des principales devises mondiales face au dollar.
A ces éléments, s’ajoute une situation macroéconomique difficile, une note mise sous surveillance par Moody’s et la multiplication des options et contrats de couverture au fur et à mesure que le référendum -remporté par le camp du oui à 51,7%- s’approchait. Dans ces conditions, la logique voudrait une vraie dégringolade du marché boursier turque. Or c’est tout le contraire qui s’est passé.
L’indice Best a gagné 17,3% depuis le début de l’année, surperformant l’indice MSCI des marchés émergents en progression de 10,69% en 2017 dont 3.4% sur la seule séance du lundi.
Ainsi, non seulement Istanbul n’a pas plongé mais il se rapproche de son record de hausse en 2013. Le coup d’Etat manqué de l’été dernier ajouté à la courte victoire du oui, le 17 avril 2017, lors d’un référendum polémique, devait selon l’analyse classique faire dévisser la place financière turque.
L’explication trouvée selon laquelle le marché était soutenu par Yatirim Finansman, filiale de la plus grosse banque commerciale privée de Turquie, qui aurait acheté 56 millions de dollars d’actions en un jour, fait du,chemin. Si tel était le cas, ces transactions auraient -elles des relents politiques ?
En un an, Yatirim Finansman est devenu le principal intervenant à Istanbul devant UBS, HSBC ou Citi, alors qu’il ne pesait auparavant que 2 % des transactions. Selon les informations, Un mystérieux fonds passerait par lui pour acheter massivement des actions. Qui est-il ?
Yatirim se retranche derrière la confidentialité due à ses clients, alors les traders l’ont surnommé «The Dude » » (Le Mec) ou « Herif » (le type, en Turc) et spéculent sur le fait que ce mystérieux investisseur, capable d’influer sur les cours, pourrait être un trader haute-fréquence. La Bourse d’Istanbul a en effet inauguré il y a quelques mois un nouveau Data Center pour ses serveurs avec l’espoir d’attirer ce genre d’investisseurs.
Mais le rebond de la bourse turque lundi pourrait aussi s’expliquer, en partie, par la publication d’une note d’une banque américaine recommandant deux des principales banques du pays à l’achat. Le secteur a d’ailleurs bondi de 5,9 % lundi, sa meilleure performance depuis 2012. Malgré tout, l’ombre du « Dude » continue de planer sur le marché turc et d’inverser les tendances. Un pari coûteux …