16 ans après son intronisation, Le roi Mohammed VI n’a rien perdu de cette sensibilité qui lui vaudra le surnom du Roi des pauvres au tout début de son règne, en juillet 1999.
Le discours prononcé le 30 juillet 2015 à l’occasion de ce 16e anniversaire s’inscrit dans la longue tradition de la dynastie alaouite qui veut que le souverain s’adresse directement au peuple. «Je ne veux pas ici parler des seules réalisations, ni m’intéresser uniquement au bilan et aux chiffres» a tout d’abord déclaré Mohammed VI qui estime que «tout ce qui a été réalisé, nonobstant son importance, restera insuffisant pour notre pays tant qu’une frange de la société continue à souffrir des conditions pénibles de la vie, et tant qu’elle éprouve le sentiment d’être marginalisée, malgré tous les efforts déjà consentis.»
L’accent est d’emblée mis sur la pauvreté. Le roi appelle à des «solutions nouvelles aptes à permettre à cette catégorie sociale de se mettre au diapason et de s’intégrer dans la vie nationale». Et de se faire encore plus précis : «les institutions, si importantes soient-elles, ne sont pas une fin en soi. De même, la croissance économique n’aura aucun sens si elle ne se traduit pas par l’amélioration des conditions de vie des citoyens.»
Fiche tchnique
-1999: Mohammed VI monte sur le trône succédant à son père, le Roi Hassan II, décédé quelques jours plutôt.
-2012: le taux d’électrification rurale atteint 98.06% contre 18% en 1995. Idem pour l’accès à l’eau potable.
-2014: Le secteur automobile réalise un chiffre d’affaires de 19,5 milliards de dirhams (environ 10 milliards de dollars), détrônant l’Office chérifien des phosphates, premier exportateur du pays depuis 1956.
-2014: le Maroc compte 1500 km d’autoroutes contre 100 km en 1999. Un millier de km
supplémentaires sont prévus à partir de 2016, pour un investissement d’au moins trois milliards d’euros.
-2010: le PIB atteint 103 milliards de dollars contre 37,03 mds en 2000
-2014: le PIB par habitant est de 3300 dollars contre 1200 en 1999.
-2014: Le Maroc est classé 129e dans l’indice de développement humain
Dans son discours retransmis en direct, le roi invite le gouvernement à établir un plan d’action intégré, fondé sur le partenariat entre les différents départements ministériels et les institutions concernées, en vue de trouver les moyens de financement des projets et de définir un échéancier précis pour leur mise en œuvre.
Par ailleurs, une bonne partie du discours royal a été consacrée aux marocains du monde, cette diaspora qui constitue avec le tourisme, l’un des premiers pourvoyeurs de devises au Maroc. «Nous attirons donc l’attention du ministre des Affaires Etrangères sur la nécessité de s’employer avec toute la fermeté requise à mettre fin aux dysfonctionnements et autres problèmes que connaissent certains consulats», a notamment déclaré le roi. «Il faudrait, de manière générale, améliorer le contact et la communication avec les membres de la communauté à l’étranger, rapprocher les prestations qui leur sont destinées, simplifier et moderniser les procédures, respecter leur dignité et préserver leurs droits.»
Par ailleurs, il a été question de la réforme de l’éducation. Le roi prône plutôt l’ouverture. «il faut faire preuve de sérieux et de réalisme, et s’adresser aux Marocains en toute franchise en leur demandant : pourquoi sont-ils si nombreux à inscrire leurs enfants dans les établissements des missions étrangères et les écoles privées, malgré leurs coûts exorbitants ? » et d’ajouter : «La réponse est claire: c’est parce qu’ils cherchent un enseignement ouvert et de qualité, fondé sur l’esprit critique et l’apprentissage des langues, un enseignement qui permette à leurs enfants d’accéder au marché du travail et de s’insérer dans la vie active.»
Pour Mohammed VI, «contrairement à ce que prétendent certains, l’ouverture sur les langues et les autres cultures, ne portera aucunement atteinte à l’identité nationale. Bien au contraire, elle contribuera à l’enrichir, d’autant plus que l’identité marocaine est, grâce à Dieu, séculaire et bien enracinée, et qu’elle se distingue par la diversité de ses composantes qui s’étendent de l’Europe jusqu’aux profondeurs de l’Afrique.»
Aussi, poursuit le roi, «la réforme de l’enseignement doit se départir de tout égoïsme et de tous calculs politiques qui hypothèquent l’avenir des générations montantes, sous prétexte de protéger l’identité».
En effet, «l’avenir de tout le Maroc reste tributaire du niveau de l’enseignement que nous offrons à nos enfants. Partant de là, la réforme de l’enseignement doit viser au premier chef à permettre à l’apprenant d’acquérir les connaissances et les habiletés et de maîtriser les langues nationales et étrangères, notamment dans les filières scientifiques et techniques qui ouvrent les portes de l’insertion sociale». En clair, le roi appelle au pragmatisme et à l’efficacité. Reste à sonder la réaction de ceux qui ont toujours milité pour l’unilinguisme au nom de La défense de l’identité nationale marocaine.