Par Dov Zerah
Le groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat, le GIEC vient de remettre son cinquième rapport, une compilation de près de 20 000 études et projections scientifiques effectuées par plus de 800 chercheurs. Ce rapport s’avère bien plus préoccupant que le précédent de 2007.
Le GIEC a été créé en novembre 1988, à la demande du G7, par deux organismes de l’ONU : l’Organisation météorologique mondiale (OMM) et le Programme des nations unies pour l’environnement (PNUE).
Ouvert à tous les pays membres des Nations-Unies, le GIEC est un organisme intergouvernemental qui « a pour mission d’évaluer, sans parti-pris et de façon méthodique, claire et objective, les informations d’ordre scientifique, technique et socio-économique qui nous sont nécessaires pour mieux comprendre les risques liés au réchauffement climatique d’origine humaine, cerner plus précisément les conséquences possibles de ce changement et envisager d’éventuelles stratégies d’adaptation et d’atténuation. Il n’a pas pour mandat d’entreprendre des travaux de recherche ni de suivre l’évolution des variables climatologiques ou d’autres paramètres pertinents. Ses évaluations sont principalement fondées sur les publications scientifiques et techniques dont la valeur scientifique est largement reconnue ».
Ce n’est pas la première fois qu’un message alarmiste sur l’état de la planète est lancé !
Il y a 42 ans déjà, en 1972, alors que nous étions encore dans « les trente glorieuses », le Club de Rome a alerté le monde avec un rapport. Ensuite, il y a eu, en 1992, le premier sommet de Rio sur la planète. Vingt ans après ce premier sommet, les mises au point du concept de développement durable et de l’agenda 21, le risque écologique est aujourd’hui connu de tous, même s’il n’est pas encore reconnu et accepté par tous.
Beaucoup a été fait mais le sentiment prévaut que la situation s’est dégradée, et que les efforts sont insuffisants pour protéger notre planète car l’engrenage des facteurs a une vitesse de plus en plus rapide.
Que nous apporte ce nouveau rapport ?
Après un premier volet sur l’état des connaissances scientifiques relatif au réchauffement, publié fin septembre 2013, et un deuxième sur l’impact et l’adaptation du changement climatique en cours sur les sociétés et écosystèmes, fin mars, la troisième partie a été présentée, le 13 avril, et concerne cette fois les mesures d’atténuation de ce dérèglement climatique.
Les experts prévoient une élévation de la température comprise entre 0,3 °C et 4,8 °C d’ici à la fin du siècle. Ils considèrent que les trois dernières décennies sont « probablement » les plus chaudes qu’ait connu l’hémisphère Nord depuis au moins mille quatre cents ans.
Plus que l’estimation de l’augmentation de la température, le travail des experts est essentiel car ils ont déterminé que ce réchauffement climatique enregistré depuis le milieu du XXème siècle, depuis le début de l’aventure industrielle, est bel et bien le fait de l’accumulation des gaz à effet de serre d’origine humaine. C’est l’homme et ses modes de vie qui sont les responsables.
Les conséquences sont nombreuses, très nombreuses. Sans être exhaustif, citons :
L’élévation du niveau de la mer a été revue à la hausse, de 26 cm à 98 cm d’ici à 2100 contre 18 cm à 59 cm dans le rapport 2007. Depuis 1900, les océans se sont déjà élevés de 19 cm. Plusieurs centaines de millions de personnes seront soumises à des inondations de plus en plus fréquentes et à une érosion des littoraux en hausse. Nous aurons à faire face aux migrants climatiques.
Il y aura de plus en plus d’événements météorologiques extrêmes, tels que les sécheresses, pluies diluviennes, cyclones tropicaux. La planète sera confrontée à une aggravation des situations critiques : les régions humides recevront plus de pluies et les régions les plus sèches connaîtront des sécheresses plus importantes.
L’agriculture enregistrera une baisse des rendements des grandes cultures. La pêche sera aussi touchée, avec des espèces marines moins nombreuses autour des tropiques et de forts taux d’extinction au niveau local. L’Afrique, l’Asie et le sud de l’Australie connaîtront des pénuries d’eau. Il en résultera un impact sur la sécurité alimentaire, et la pauvreté augmentera. Le cercle vicieux des effets collatéraux se manifestera avec des maladies climatiques.
Sont également mentionnés des risques d’extinction d’espèces terrestres et marines. Des écosystèmes marins, comme ceux des pôles et les barrières de corail, sont déjà exposés avec l’acidification des océans. Des actions de reforestation s’avéreront essentielles pour lutter contre la hausse de la mortalité des arbres.
Le réchauffement climatique entrainera une telle déstabilisation du monde qu’il y aura plus de conflits et de rivalités entre les populations ou les Etats autour de ressources plus rares.
Comme en 2007, les experts mettent en garde contre le coût économique de l’inaction. Plus nous tardons à agir, plus la facture s’allonge pour nos enfants. Une augmentation de la température mondiale de 2 °C pourrait entraîner une perte d’entre 0,2 % et 2 % des revenus annuels mondiaux.
Limiter d’ici à 2050 la concentration des gaz à effet de serre exige de réduire les émissions mondiales de 40 % à 70 %, alors que la population va augmenter de deux milliards d’habitants. Cela n’est possible que par une gouvernance et une coordination internationales très poussées. Cela nécessite un volontarisme de tous les responsables de par le monde qui fait face à une effrayante course contre la montre.
La mise au point d’un modèle de développement durable susceptible de permettre à la planète de subvenir aux besoins de 9 à 10 milliards de personnes n’est pas encore explicité. Il exige des changements d’approche dans tous les secteurs dont, en premier lieu, celui de l’énergie qui représente 35 % des émissions, devant l’agriculture et la forêt (24 %), l’industrie (21 %), les transports (14 %) et le bâtiment (6 %). Parmi les recommandations des experts je relève notamment le recours aux énergies peu carbonées, c’est-à-dire aux énergies renouvelables et au si contesté nucléaire.
Cela exige des efforts individuels et collectifs.
Personne ne doit oublier qu’il n’est qu’un locataire de la planète et que, tout en subvenant à ses besoins, il doit essayer de la rendre dans un état satisfaisant pour le bien-être de ses descendants.
Dov ZERAH