Médecins sans Frontières dénonce le manque de soutien international, face à des systèmes sanitaires locaux « dépassés », au Libéria, en Sierra Léone et en Guinée, où l’épidémie d’Ebola continue de progresser, avec 1229 morts selon les derniers chiffres publiés mardi par l’OMS.
Le bilan ne cesse s’alourdir. En cinq mois, cette fièvre hémorragique très contagieuse a fait 1.229 morts (confirmés, suspects ou probables) selon le dernier bilan de l’OMS arrêté au 16 août : 466 au Liberia, 394 en Guinée, 365 en Sierra Leone et quatre au Nigeria. La progression reste donc forte malgré la mobilisation internationale contre cette épidémie sans précédent depuis l’apparition de la maladie en 1976. En deux jours, selon ce dernier bilan, 113 nouveaux cas et 84 décès ont été enregistrés dans ces pays. C’est toujours au Liberiaque la maladie progresse le plus vite avec 48 nouveaux cas et 53 morts. En Guinée, 24 cas et 14 morts de plus ont été recensés ; en Sierra Leone 38 cas et 17 morts. Seulement trois cas, sans décès supplémentaire, ont été constatés au Nigeria.
Lueurs d’espoir au Nigeria et en Guinée
Cependant, l’OMS, qui a décrété le 8 août une urgence de santé publique mondialeet recommandé des mesures d’exception dans les pays affectés, a évoqué quelques lueurs d’espoir au Nigeria, pays le plus peuplé d’Afrique, mais aussi en Guinée. « Ce qui est encourageant au Nigeria, c’est que seulement une chaîne de transmission a été identifiée jusqu’à présent », a déclaré une porte-parole de l’OMS, Fadela Chaïb, lors d’un point presse à Genève. Il s’agit de l’américano-libérien Patrick Sawyer, décédé fin juillet à Lagos où il était venu en voyage, et aux gens qu’il a contaminés. « C’est une bonne nouvelle », a-t-elle souligné, évoquant les « effets positifs » des mesures prises et de la « vigilance » observée par les autorités nigérianes. En Guinée, d’où est partie l’épidémie en mars, la porte-parole a fait état de « quelques mesures (…) efficaces », même si la flambée n’est pas encore « contrôlée ».
Les 17 malades enfuis ont été retrouvés
Le Liberia, de son côté, reste au coeur des préoccupations. Selon le dernier bilan de l’OMS, c’est dans ce pays très démuni qu’il y a eu le plus de nouveaux décès entre les 14 et 16 août, avec 53 morts et 48 nouveaux cas. Et l’évasion de 17 présumés malades d’Ebola échappés dimanche d’un centre d’isolement de la capitale Monrovia ce week-end a aggravé les inquiétudes depuis dimanche. Ces personnes ont cependant été retrouvées et transférées dans une autre centre, a annoncé mardi le ministre libérien de l’Information Lewis Brown.
Le danger de contamination est élevé, d’après le gouvernement, qui envisage une mise en quarantaine du quartier concerné (environ 75.000 habitants), comme c’est déjà le cas pour trois provinces du nord du pays. « Ces voyous qui ont pillé le centre sont tous maintenant probablement porteurs du virus Ebola. La mise en quarantaine du quartier pourrait être une solution », a déclaré lundi à l’AFP le ministre libérien de l’Information Lewis Brown.
Face à l’ampleur de la crise dans la région et aux mesures prises par les autorités, l’OMS travaille notamment avec le Programme alimentaire mondial (PAM) pour acheminer de l’aide à un million de personnes vivant en quarantaine dans différentes régions en Guinée, au Liberia et en Sierra Leone.
Un cas suspect en Allemagne
Une agence pour l’emploi de Berlin a été fermée mardi en raison d’un cas suspect de virus Ebola, à la suite du malaise sur place d’une femme originaire d’Afrique de l’Ouest. Présentant « une forte fièvre » et des « problèmes de circulation » évoquant une « maladie infectieuse », la patiente a été transportée à l’hôpital de la Charité, a indiqué Rolf Erbe, un porte-parole des pompiers. Mais, selon un communiqué de l’hôpital de la Charité en milieu d’après-midi, les médecins « ne concluent pas pour l’heure à l’infection par le virus Ebola, et penchent beaucoup plus pour une gastro-entérite ». « Pour écarter formellement le risque d’Ebola, une analyse de sang sera évidemment réalisée », précise l’hôpital. L’Allemagne a connu plusieurs cas suspects depuis le début de l’épidémie de cette fièvre hémorragique. Mais chaque fois la suspicion d’Ebola a finalement été écartée.
Le personnel navigant d’Air France refuse d’embarquer vers les pays touchés
Certains personnels navigants d’Air France « n’ont pas souhaité effectuer leur mission » pour se rendre en Guinée, en Sierra Leone ou au Nigeria, pays touchés par l’épidémie d’Ebola, a expliqué à l’AFP un porte-parole de la compagnie, affirmant que « tous les vols ont été maintenus » sur ces destinations.
« Dans tous les cas, tous les vols sont partis avec des équipages composés en totale conformité, en nombre comme en qualification, avec la réglementation », a affirmé la compagnie d’aviation, soulignant qu' »il n’y a eu aucun impact et que l’ensemble des programmes de vols ont été maintenus » sur ces destinations.
Selon Air France, « la compagnie n’oblige pas un membre du personnel naviguant commercial a effectuer sa mission vers des destinations telles Conakry, Freetown, et Lagos ». Ces trois villes sont classées comme destination à risque par le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) d’Air France. La compagnie dessert « quotidiennement Conakry, ainsi que Lagos et trois fois par semaine Freetown ».
Lundi, le syndicat national du groupe Air France (SNGAF), minoritaire, a lancé une pétition, demandant « l’arrêt immédiat de la desserte des pays touchés par le virus Ebola ». « Nous savons que nous avons un métier à risque, mais avec des risques mesurés. Là c’est totalement hors de contrôle, les informations ne sont pas les mêmes d’un jour à l’autre », a déploré Sophie Gorins, secrétaire générale du SNPNC, troisième syndicat de navigants.
Un commandant de bord peut invoquer son droit de retrait, s’il estime encourir un « danger grave et imminent » pour sa vie ou sa santé. Ce droit est alors appliqué à l’ensemble de l’équipage, qui est remplacé par un équipage de réserve. Confrontés à la même situation, les hôtesses et stewards peuvent invoquer une « clause de fatigue ». En 2009, en raison de la grippe porcine, des équipages d’Air France avaient fait valoir leur droit de retrait pour ne pas embarquer à bord de vols à destination du Mexique.
L’état des médecins africains traités au Mzapp s’amélioreL’état des trois médecins africains atteints de la fièvre Ebola auxquels un traitement expérimental a été administré s’est amélioré de façon « remarquable », a annoncé mardi le ministre libérien de l’Information. Lewis Brown. Les médecins libériens Zukunis Ireland et Abraham Borbor, et leur collègue nigérian Aroh Cosmos Izchukwu sont les premiers Africains à recevoir le traitement ZMapp, qui leur est administré depuis jeudi. Deux travailleurs humanitaires américains et à un prêtre espagnol en avait déjà bénéficié.
Source: AFP, Les Échos