Le Maréchal Abdel Fettah Sissi a été élu avec un score de 97% pour un taux de participation de 47%. Un plébiscite rappelant son devancier Hosni Moubarak lequel, dans ses heures de gloire, se payait le luxe de tutoyer les cieux en se faisant réélire par des scores frôlant les 99%, réservant les 1% à Dieu comme il le dit un jour en plaisantant devant une oreille indiscrète.
Par Adama Wade
Le printemps arabe a balayé Moubarak, cédant le pouvoir aux Frères musulmans et à des procès planétaires où l’ancien pharaon, nu dans sa cage, aura frôlé la corde de Saddam Hussein. Aussi courte qu’intense, l’intermède des Frères musulmans a confirmé les appréhensions des élites bourgeoises qui gouvernent le monde sur le danger de laisser libre cours à la démocratie. Alain Minc a raison: le pouvoir est une affaire d’élites. Peut être même d’aristocrates comme l’aurait aimé Tocqueville, auteur de « De la Démocratie en Amérique ». En Égypte, le pouvoir du peuple aura juste duré le temps d’un printemps.
La populace partie de la place Tahrir rêvait de remettre à plat les accords du camp David, d’ouvrir le terminal de Rafah et, pourquoi pas, de s’unir à la Palestine. le pouvoir démocratique a perdu la bataille de la communication, passant aux yeux de l’opinion internationale comme l’instigateur des attaques contre les coptes et du raidissement général contre les minorités.
Et, pour ne rien arranger aux Affaires des islamistes, voilà que le FMI bloque définitivement le milliard promu, accélèrant le mécontentement général. Le coup d’Etat du Maréchal intervient alors que les islamistes ont perdu la bataille de l’opinion « audible » en Occident.
Jamais un putschiste n’aura bénéficié de tant de clémence de la part de ceux qui voulaient chasser le syrien Bachar Assad au nom de cette démocratie « embeded » tout comme les journalistes. La formalisation démocratique du régime Sissi, dans la même période que la réélection (pas de doutes à ce niveau) du président syrien n’aura, curieusement pas, suscité de débat dans les médias main stream.
Cette légitimité de façade à été entérinée par les grandes puissances et l’Arabie Saoudite qui salue « Une journée historique » et appelle à une conference des donnateurs. Mais ‘Union africaine est restée à l’écart. Souvent traitée de syndicat de chefs d’Etat spécialistes du troisième mandat, l’organisation panafricaine se retrouve en porte à faux avec Bruxelles et Washington. Ainsi qu’avec les monarchies membres du Conseil de coopération du Golfe (CCGF). Mais en parfait accord avec le Qatar, un des rares pays du Golfe qui se souvient encore que le président égyptien démocratiquement élu au lendemain du printemps arabe a pour nom Mohamed Morsi, élu par les urnes, destitué par les armes. Depuis la contre-revolution, il y a 11 mois, 1 400 partisans des Fréres musulmans ont trouvé la mort, 15 000 emprisonnés. Cela ne dérange personne que l’Egypte soit revenu dans ce qui est considéré comme la norme arabe.