En Afrique de l’Est comme ailleurs, la capitalisation boursière (valeur totale d’une entreprise en bourse) reste souvent l’étalon de mesure ultime pour determiner la hiérarchie des principales sociétés. Probablement parce qu’elle est le seul baromètre synthétique, capable tout à la fois de tenir compte des éléments factuels propres à une entreprise (revenus, profits, valeur comptable des actifs détenus…) que de la part “intangible” liée à la psyché collective du marché (enthousiasme ou défiance, craintes et espoirs associés à telle ou telle valeur). Avec des entreprises qui décollent ou qui stagnent, et des secteurs qui montent ou sont plus à la peine, les grandes capitalisations boursières de la région sont en tous les cas le reflet fidèle de cette Afrique orientale des affaires en mouvement ; riche tout autant de défis à relever que d’opportunités à saisir. Passage en revue des 10 poids lourds de la scène boursière est-africaine.
par Jacques Leroueil, Kigali
1) Safaricom, Télécoms, Kenya
Capitalisation boursière ٭ (en millions de $) : 5896 contre 3 120 pour la Sonatel (BRVM, Afrique de l’Ouest)
Variation boursière annuelle٭ : + 84 %
Avec des revenus et un bénéfice en progression respective de 16 et 31 % pour l’exercice fiscal 2014 (achevé fin mars), l’opérateur télécom kényan, (19 millions d’abonnés) est en grande forme. La bourse le lui rend bien. Avec un quasi doublement du cours de son titre depuis fin mai 2013 et une valorisation approchant désormais les 6 milliards de $, l’opérateur télécom est le géant est-africain des marchés (1/5 de la capitalisation globale de toutes les bourses de la région)
2) EABL, Brasserie, Kenya
Capitalisation boursière٭ (en millions de $) : 2511
Variation boursière annuelle –28 %
Avec des résultats en modeste hausse pour le premier semestre 2014 (+ 4 % pour le chiffre d’affaires et le profit), pas de quoi sabrer le champagne pour le brasseur, qui a principalement souffert d’une conjoncture difficile sur le marché tanzanien (baisse de 11 % des ventes ). Les investisseurs n’ont pas aimé en tous les cas : l’action a perdu plus du quart de sa valeur au cours de l’année écoulée.
3) Equity, Banque, Kenya
Capitalisation boursière٭ (en millions de $) : 1675
Variation boursière annuelle٭ : + 15 %
Dans la lutte à couteaux tirés qui se joue entre les 2 mastodontes bancaires kényans que sont KCB et Equity, c’est le deuxième qui a eu le dernier mot cette année à la bourse de Nairobi. L’établissement financier dirigé par James Mwangi est désormais la première capitalisation financière est-africaine, devant sa rivale de toujours.
4) KCB, Banque, Kenya
Capitalisation boursière٭ (en millions de $) : 1570
Variation boursière annuelle٭ : + 11 %
Le concurrent Equity a beau avoir rafler à l’arraché la première place en bourse, dans la “vraie vie”, c’est encore KCB qui occupe la première position : avec des actifs totaux proches de 5 milliards de $ et un résultat net de près de 170 millions de $ en 2013, le kényan reste le plus grand établissement financier de la région.
5) Tanzania Breweries, Brasserie, Tanzanie
Capitalisation boursière٭ (en millions de $) : 1465
Variation boursière annuelle٭ : + 158 %
Au pays du Kilimandjaro, la performance boursière du brasseur tanzanien (filiale du géant SABMiller) a atteint des sommets au cours de l’année écoulée. Avec un bénéfice d’exploitation récurrent correspondant à 25 % du chiffre d’affaires et une part de marché nationale supérieure à 70 %, Tanzania Breweries est une cash-machine qui sait aussi se montrer généreuse avec ses actionnaires. En novembre, le titre a bondi de 15 % en une seule séance après que la direction ait annoncé qu’elle redistribuerait la moitié de ses bénéfices semestriels en dividendes.
6) Barclays, Banque, Kenya
Capitalisation boursière٭ (en millions de $) : 1051
Variation boursière annuelle٭ : -7 %
La filiale kényane de la britannique Barclays est à la peine. Ses actifs représentent la moitié de ceux de KCB mais ses bénéfices sont 7 fois moindres. Une profitabilité moindre que ses grands rivaux, plus agressifs commercialement et à la gestion au cordeau, et qui continuent de lui grignoter des parts de marché. Barclays n’en reste pas moins un acteur incontournable du marché bancaire de la première économie est-africaine.
7) Standard Chartered, Banque, Kenya
Capitalisation boursière٭ (en millions de $) : 963
Variation boursière annuelle٭ : + 3 %
Là encore, une grande banque kényane filiale d’un puissant conglomérat financier, le britannique Standard Chartered. Avec plus de 100 millions de $ de bénéfices dégagés en 2013 et plus de 2 milliards de $ d’actifs sous gestion, la Stanchart Kenya est assurèment un bon élément de la galaxie Standard Chartered. Il est vrai que la filiale kényane a, grâce à sa société-mère londonienne, un énorme avantage sur ses consoeurs locales : elle peut emprunter de l’argent pour presque rien sur les marchés internationaux. Moins de 3 % en moyenne quand les banques de la région empruntent allègrement au-dessus de 12 %. Tout est dit.
8) Co-operative Bank, Banque, Kenya
Capitalisation boursière٭ (en millions de $) : 865
Variation boursière annuelle٭ : + 29 %
L’ascension continue pour la Co-op Bank, désormais 3e banque du pays en terme d’actifs (après KCB et Equity avec 3 milliards de $ sous gestion) et 2e par le nombre de clients (après Equity avec 3,5 millions de comptes). Les investisseurs en redemandent : avec près de 30 % de progression sur une année, l’action est à son plus haut depuis l’introduction en bourse de la banque en 2008.
9) Bamburi Cement, Construction, Kenya
Capitalisation boursière٭ (en millions de $) : 715
Variation boursière annuelle٭ : -17 %
Temps difficiles pour le cimentier kényan qui a pris de plein fouet la nouvelle concurrence frontale faite par de petits opérateurs, plus flexibles au niveau des prix et aux coûts d’exploitation moindres. De nouveaux acteurs qui sont bien déterminés à prendre leur part du gâteau. Mais le pire est peut-être à venir pour Bamburi : le rouleau compresseur Dangote Cement, 1er cimentier du continent, ne devrait pas tarder à débarquer. Les investisseurs ont conséquemment largué leurs titres en attendant d’ y voir plus clair.
10) Bralirwa, Brasserie, Rwanda
Capitalisation boursière٭ (en millions de $) : 650
Variation boursière annuelle٭ : + 4 %
Après avoir vu le cours de son action être multiplié par plus de 6 depuis son introduction en bourse en janvier 2011, le «phénomène» Bralirwa s’est quelque peu dégonflé pour retrouver une trajectoire plus normale à la cote du Rwanda Stock Exchange (RSE). Le premier brasseur du pays devrait cependant rester encore pour un certain temps la valeur star de la bourse rwandaise : l’entreprise pèse à elle seule les 2/3 de la capitalisation domestique totale du RSE, et brasse autant l’argent que la bière (20 % de marge bénéficiaire nette, après impôts).
٭ Données établies sur la base des cours de clôture du 23 mai 2014