L’Afrique dans la chaîne de la mondialisation
Le lancement du rapport de l’OCDE sur l’Afrique, le 19 mai 2014 à Kigali, en marge des Assemblées générales de la Banque Africaine de Développement, a mis l’accent sur la chaîne de valeur dans le contexte de la mondialisation.
Adama Wade, Kigali
L ´italien Mario Pezzini, directeur du centre de développement de l’OCDE, a tout de suite planté le décor: « L’insertion du continent dans la chaîne de mondialisation passe par la spécialisation dans les semi-produits qui constituent la part prépondérante du commerce mondial ».
En plus d’être technologiquement plus facile d’accès que les produits finis, le commerce des biens intermédiaires bénéficie de régimes plus cléments en termes de barriéres tarifaires et non tarifaires. L’investissement est moins lourd n’intégrant pas tout le processus de fabrication. Le transfert de savoir faire est particulièrement important dans ce créneau, estime l’italien qui rappelle que cette insertion est d’autant plus logique que le monde évolue en ce moment dans un cycle de montée des pays émergents qui devrait profiter à l’Afrique.
Seulement, remarque-t-il, si les pays développés ont vu leur part dans les exportations de produits semi-finis chuter de 80 à 60% entre les années 80 et les années 2000, au profit des économies émergentes dont la part a doublé pour atteindre 40%, l’Afrique, elle, est restée à la marge. Au tout début des années 80, sa part stagnait à 1,4%. Aujourd’hui, cette proportion se stabilise à 2,1% tirée par l’Afrique du Sud et une Afrique du Nord faiblement connectée au reste du continent.
Le diagnostic posé, il d’agit de définir désormais le chemin à suivre pour raccorder les économies africaines à la chaîne de la mondialisation. Quel avantage comparatif mettre en avant ? Les bas salaires, sachant que le continent dispose d’un gisement de 200 millions de jeunes âgés entre 15 et 24 ans? En 2040, quelque 59% de ces jeunes vont avoir un diplôme supérieur.
L’avantage comparatif des salaires est entrain de favoriser aujourd’hui certains grands marchés africains ( Éthiopie, Nigeria) dans le mouvement des délocalisations. Cette tendance est accentuée par l’augmentation du niveau de vie en Inde et en Chine. Cependant, la volatilité de l’argument des « bas salaires » qu’il faut du reste relier aux paramètres de productivité et de l’environnement des affaires en général en fait un avantage comparatif difficile à exploiter dans la durée.
En fait l’argument imbattable de l’Afrique reste son soûl sol riche en hydrocarbures et en minerais. Là aussi, la semi-transformation devrait s’affranchir des coûts de la logistique souvent prohibitifs. « L’on se focalise sur les barrières d’entrée, mais il y a aussi cet aspect logistique qui pèse sur la compétitivité des économies africaines », relève M. Pezzini.
Dans tous les cas, le modèle T de Forbes préconisant la fabrication d’une pièce dans un seul endroit est battu en brèche par la mondialisation qui a tendance à fractionner le processus de production entre plusieurs pays. Apparemment, cette nouvelle division du travail est à l’origine des grands bouleversements – bouleversements imprévisibles il y a 30 à 40 ans, selon Pascal Lamy présent dans le panel qui appelle l’Afrique à tracer sa propre voie- .
Ainsi, dans les années 90, seuls 13 pays faisaient deux fois le taux de croissance de l’OCDE Dans les années 2010, 83 l’ont fait .. avec une croissance de 4.8%, contre 5,4% en Asie du Sud Est et 3% en Amérique Latine, l’Afrique est résolument inscrite dans cette tendance. » Nous disposons de suffisamment de matériaux pour savoir ce qui impacte la chaîne de valeur, dira Donald Kaberuka. En clair, l’Afrique doit gagner la bataille de le logistique pour une meilleure compétitivité. La réduction de 18 à jours du temps de trajet d’un camion de Mombassa à Kampala grâce uniquement à la suppression des Check points montre qu’une grosse partie du surcoût logistique est à chercher dans la réorganisation administrative de la chaîne d’import-export.